Missions premières

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 25 juillet 2007 - 331 mots

L’envolée du marché de l’art ne fait pas que des heureux. Réduits à composer avec des budgets d’un autre temps, les musées français ont aujourd’hui de plus en plus de difficultés à accomplir l’une de leurs missions premières : l’enrichissement de leurs collections. À côté d’une poignée d’institutions, souvent parisiennes, qui disposent encore des moyens de leurs ambitions, les autres doivent jongler avec des aides publiques exceptionnelles et, le plus souvent, s’adresser au mécénat d’entreprises ou de particuliers. Certes, l’histoire de nos collections nationales est ponctuée d’éminentes donations, à l’exemple de la collection, exceptionnelle, de peintures anciennes du docteur Louis La Caze, léguée à l’État en 1869, et dont le Musée du Louvre rend jusqu’au 9 juillet hommage. Mais pour combler les manques et renforcer les points forts d’une collection, le passage par une acquisition sur le marché est souvent obligatoire, un acte rendu d’autant plus difficile par une concurrence internationale.
Cette dernière est encore plus farouche dans le domaine de l’art contemporain, comme nous avons encore pu le constater lors de la dernière édition de la Foire de Bâle. Alors que le nombre de yachts amarrés à Venise lors des journées professionnelles de la Biennale a battu tous les records, les listes d’attente pour les stars du marché ne cessent de s’allonger. Heureusement, ces artistes ne sont parfois pas les plus intéressants, montés en épingle qu’ils sont par quelques conseillers qui passent plus de temps dans les cocktails qu’à lire des revues d’art. Avec leurs budgets lilliputiens, les Fonds régionaux d’art contemporain (FRAC) jouent dans une autre cour. Leur salut passe par la découverte des artistes avant tout le monde, un véritable jeu d’équilibriste. Et encore faut-il que l’on fasse confiance à ces experts : à la fin des années 1990, le FRAC Poitou-Charentes avait réussi à négocier l’achat d’une importante pièce de Maurizio Cattelan pour moins de 10 000 euros. Mais son conseil d’administration lui avait à l’époque refusé de finaliser la transaction. Sur la foire de Bâle, Emmanuel Perrotin vendait un Cattelan… 400 000 dollars !

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°262 du 22 juin 2007, avec le titre suivant : Missions premières

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