Éditorial

Le « Slow art day »

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 11 avril 2019 - 393 mots

Expérience visiteur. Le 6 avril dernier s’est tenue la dixième édition du « Slow Art Day ».

Vous ne connaissez pas le « Slow Art Day » ? C’est normal, c’est une initiative anglo-saxonne et seuls deux musées français y ont participé. La manifestation est partie d’un constat : les visiteurs de musées regardent pendant très peu de temps les œuvres, certains passent même plus de temps à lire les cartels qu’à observer le tableau. Cela a été mesuré. Une revue américaine a ainsi observé qu’à l’Art Institute de Chicago les visiteurs regardent en moyenne une œuvre pendant vingt-huit secondes, un chiffre sensiblement le même que quinze ans auparavant au Metropolitan Museum of Art à New York.

D’où l’idée d’inciter le public à prendre son temps. Les participants sont invités à observer pendant une dizaine de minutes une œuvre, quatre au total, avant, si c’est possible, d’en discuter avec d’autres visiteurs ou plus tard avec des amis.

Les musées sont sollicités pour participer à l’opération et organiser les choses à leur manière ; cette année,175 y ont pris part. En France, le Musée national des châteaux de Malmaison (Hauts-de-Seine) proposait aux visiteurs un dépliant qui les dirigeait vers quatre œuvres sélectionnées, et stimulait leur curiosité à l’aide d’un jeu de questions/réponses. Le Musée d’art et d’histoire de Saint-Denis, également en banlieue parisienne, avait, lui, organisé un circuit méditatif qui conjuguait sophrologie, méditation et observation des œuvres. Une proposition qui sera d’ailleurs renouvelée en mai prochain.

Il serait tentant de voir dans ce « Slow Art Day » une simple déclinaison superficielle de la très à la mode et très bobo « slow life ». Ce serait dommage car son fondement est juste, l’art n’ouvre véritablement l’esprit que lorsqu’on tente d’entrer dans l’œuvre. Qui n’a pas été conquis par un médiateur en verve sachant captiver son auditoire en racontant mille détails sur une toile, des détails que l’on n’aurait certainement pas vus en vingt-huit secondes ?

Les grandes expositions et leurs 200 œuvres en moyenne que l’on picore en une heure ont formaté les habitudes. Que retiennent vraiment la plupart des gens ? Une impression générale, deux ou trois informations, un moment de distraction. Ce n’est pas rien, mais c’est moins enrichissant ou épanouissant que le vertueux « slow art ». Une vertu parmi d’autres et pas la moindre : l’exercice peut être pratiqué dans les collections permanentes, moins fréquentées que les expositions temporaires.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°521 du 12 avril 2019, avec le titre suivant : Le « Slow art day »

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