Société

Éditorial

Intérêt général et responsabilité

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 12 décembre 2018 - 378 mots

PARIS

À l’heure des bilans, le contexte général est si préoccupant que l’on ne peut en faire l’économie dans une synthèse de l’année culturelle.

Il concerne la déresponsabilisation des élites politiques. Partout dans le monde, le populisme gagne du terrain, mettant au pouvoir des apprentis sorciers. Même l’Italie, si cultivée, a succombé à cet obscurantisme. Comment ne pas s’inquiéter de ces démagogues anachroniques qui conduisent des politiques égoïstes insensées, au détriment des générations suivantes à qui ils vont laisser une planète en danger, des monceaux de dettes et des réflexes de repli ? Au Royaume-Uni où, après une campagne affligeante qui a mené au Brexit, les députés s’apprêtent à voter contre l’accord de sortie, risquant de plonger leur pays dans le chaos par pur intérêt tactique personnel.

Les politiques ne sont pas seuls en cause. Outre-Manche, les tabloïds britanniques ont joué avec le feu en désinformant leurs lecteurs. En France aussi certains médias s’égarent. Lorsque les chaînes d’information en continu consacrent des heures d’antenne aux affrontements lors des protestations des « gilets jaunes », elles excitent les manifestants en leur donnant une audience démesurée et, par un effet de grossissement, projettent une image biaisée de la situation. À la démagogie des politiciens répond la course à l’audience des médias. Tout cela encore une fois aux dépens de l’intérêt général.

Il n’est donc pas étonnant que le mauvais exemple venu d’« en haut » incite les « gens d’en bas » à faire de même. Mis à part les casseurs et les délinquants qui pillent les boutiques, la grande majorité des manifestants qui expriment leur mal-être dans des injonctions contradictoires (moins d’impôts, plus de service public) se comportent comme ces enfants qui se rebellent contre leurs parents en sachant bien, au fond d’eux-mêmes, que ces derniers leur apporteront toujours la sécurité affective et matérielle. Mais les États, eux, peuvent se dérober. L’accès gratuit aux soins et à l’enseignement, les infrastructures modernes, les aides sociales ne viennent pas du ciel.

Depuis les Lumières, on sait que la culture – on y arrive ! – et l’éducation sont les seuls leviers d’élévation des individus pour les mettre dans les dispositions intellectuelles leur permettant d’accepter de concilier intérêt général et intérêt personnel. Oui mais comment faire ? Le grand débat national annoncé par Emmanuel Macron devrait commencer par cela.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°513 du 14 décembre 2018, avec le titre suivant : Intérêt général et responsabilité

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