D'une fondation à l'autre

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 24 juin 2005 - 373 mots

Le mois de juin a bien commencé pour l’art français avec le Lion d’or obtenu à la Biennale de Venise par Annette Messager. L’artiste, la première femme à représenter notre pays dans cette manifestation plus que centenaire, a en effet réalisé une installation très remarquée autour de la figure de Pinocchio. Après le Lion d’or de Fabrice Hyber en 1997 et le prix spécial de Pierre Huyghe en 2001, cette récompense vénitienne est la troisième pour un artiste français en cinq biennales. Cette performance permet tout de même de relativiser le prétendu déclin de nos artistes sur la scène internationale et donnera, espérons-le, un coup d’arrêt à l’auto-flagellation chronique de la scène française.
Autre préjugé qui a la vie dure, celui de la faiblesse du mécénat en France. Encore une fois, le pavillon français de la Biennale de Venise est exemplaire, avec son financement public et le soutien privé de LVMH. À Paris, le groupe de luxe est aussi sous les projecteurs après sa décision précipitée de fermer les portes de la Samaritaine en invoquant des raisons de sécurité. Il pourrait les rouvrir dans cinq ou dix ans, selon les scénarios évoqués, mais avec une tout autre configuration. Après François Pinault et son palais vénitien, Bernard Arnault, le patron de LVMH, pourrait, selon nos informations, choisir ce « palais » parisien qui a presque les pieds dans l’eau pour y installer une collection d’œuvres d’art, et faire de la Samaritaine le siège d’une fondation à créer. L’emplacement, en plein cœur de Paris, serait idéal pour attirer plusieurs centaines de milliers de visiteurs tous les ans, et en faire une étape incontournable sur le parcours entre le Musée du Louvre et le Centre Pompidou. La Samaritaine, qui continuerait son activité commerciale, au moins pour ses espaces donnant sur la rue de Rivoli, accueillerait les collections d’art de LVMH et/ou de Bernard Arnault sous sa splendide verrière centrale. Espérons seulement que le groupe de luxe, ambassadeur de l’excellence à la française, saura ne pas y réitérer la même erreur que pour son siège de l’avenue Montaigne, où il avait fait l’impasse sur les créateurs hexagonaux. Mais la Biennale de Venise vient salutairement de lui montrer que c’est sur les artistes français qu’il faut aujourd’hui miser.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°218 du 24 juin 2005, avec le titre suivant : D'une fondation à l'autre

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