Albert Oehlen, éloges de la peinture

Musée d’Art moderne de la Ville de Paris/Arc

Par Colin Cyvoct · L'ŒIL

Le 19 novembre 2009 - 386 mots

L’exposition de l’artiste allemand Albert Oehlen (né en 1954) permet de prendre du recul vis-à-vis d’une exception culturelle bien française : le débat sur la disparition et le possible retour en grâce de la peinture dans l’art contemporain.

En effet, la peinture, médium plusieurs fois millénaire, n’a jamais cessé d’occuper une place de premier plan sur la scène culturelle contemporaine allemande, tout comme sur les autres scènes européennes, asiatiques ou américaines.
   
    En réaction au minimalisme et à l’art conceptuel perçus comme trop formalistes et intellectuels, un impétueux mouvement néo-expressionniste appelé aussi « Nouveaux Fauves » émerge outre-Rhin à la fin des années 1970. Acteur emblématique de ce courant, Albert Oehlen développe à cette époque un style fougueux et ironique. La volonté délibérée de produire ce qu’il appelle lui-même, avec un sens aigu de la provocation, de la « mauvaise peinture » le conduit à considérer sa toile comme un champ de bataille paroxysmique. Acharné à surcharger, saturer et violenter les matières et les couleurs, il n’a cure des clivages entre abstraction et figuration. Toujours à l’affût d’innovation, il réalise ses premières « peintures à l’ordinateur » en 1992.
   
    Conçue en étroite collaboration avec l’artiste, l’exposition de l’Arc confronte une série de peintures et de dessins récents à des œuvres des années 1980 et 1990. Il est cependant regrettable que l’artiste et les commissaires aient fait l’impasse sur les « peintures à l’ordinateur », pourtant peu montrées en France, de peur de désorienter le public.
   
    Les toiles des années 1980/1990, plaisantes et pondérées, n’ont plus grand-chose à voir avec la « mauvaise peinture » dérangeante et vivace des années 1970. Elles sont cependant encore bien éloignées de cette « peinture incroyablement belle » à laquelle l’artiste aspire aujourd’hui.
   
    Les œuvres les plus récentes reprennent avec brio un procédé efficace : peindre avec énergie sur une partie de la toile en se gardant bien de la recouvrir entièrement, laissant ainsi d’importants espaces vierges qui font ressortir les parties fortement peintes. Comme l’avait expérimenté, entre autres, un des pères de l’abstraction lyrique, Georges Mathieu, dans les années 1950. Cette exposition séduisante permet de découvrir un Albert Oelhen apaisé.

« Albert Oehlen », musée d’Art moderne de la Ville de Paris/Arc, 11, avenue du Président-Wilson, Paris XVIe, www.mam.paris.fr, jusqu’au 3 janvier 2010.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°619 du 1 décembre 2009, avec le titre suivant : Albert Oehlen, éloges de la peinture

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