Van de Velde, mémoires inédits

Tantôt père, tantôt compagnon de la modernité

Le Journal des Arts

Le 1 juillet 1996 - 421 mots

Si vous désirez savoir pourquoi le théâtre des Champs-Elysées s’appelle ainsi alors qu’il n’est pas situé sur l’avenue du même nom, lisez le Récit de ma vie de Van de Velde (1863-1957), p. 325. Si vous voulez en savoir plus sur la place qu’a pris ce dernier dans la conception du bâtiment, lisez également les pages suivantes.

La publication des mémoires inédits du peintre-décorateur-architecte belge par Anne van Loo avec l’aide de Fabrice de Kerkhove, au prix de recherches considérables dans les archives de l’artiste et d’un monumental travail d’édition, constitue un apport inappréciable pour la compréhension de la vie artistique de la fin du XIXe et du XXe siècle : un premier volume est paru en 1992, couvrant les années 1863-1900 ; voici le second, pour la période 1900-1917.

En 1902, Van de Velde s’installe à Weimar, par l’entremise d’Harry Kessler, pour y fonder une école des arts décoratifs qui anticipe sur le Bauhaus que Gropius créera dans la même ville en 1919. Il y fait la connaissance de la sœur de Nietzsche, mort en 1900, aménage le bâtiment des Archives voué au philosophe et dresse, en 1911, un avant-projet de mémorial. Dans le même temps, il tente d’empêcher la destruction du théâtre de Goethe et réalise de nombreuses commandes privées, comme le Hohenhof (1907-1908) à Hagen. En 1910, le voici à Paris, élaborant un projet pour le théâtre des Champs-Elysées, qu’Auguste Perret pillera sans trop de vergogne. En 1914, il construit à Cologne le théâtre de l’exposition du Werbund et participe à un vif débat avec Hermann Muthesius sur les contradictions entre la liberté de l’artiste et les objectifs de la production en série. La violation par l’Allemagne de la neutralité belge et la guerre mettent un terme aux activités débordantes d’un pacificiste qui a cru pouvoir inscrire son action dans le cadre européen. En 1917, Van de Velde parvient à gagner la Suisse.

À travers ce récit, se découvre l’homme, activiste, dépressif, égocentrique, et se confirme l’artiste, tantôt père, tantôt compagnon de la modernité, mais toujours auprès d’elle. On y relit une époque d’une fécondité prodigieuse : le récit de la générale du Martyre de saint Sébastien en 1911 (il parle de d’Annunzio, l’auteur du texte, mais pas du tout de Debussy) est comique et cruel. On attend le troisième volume.

Henry van de Velde, Récit de ma vie. Berlin-Weimar-Paris-Bruxelles, t. II, 1900-1917, texte établi et commenté par Anne van Loo avec la collaboration de Fabrice van de Kerckove, introduction par François Loyer, V.E.R.S.A.-Flammarion, 542 p., 327 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°27 du 1 juillet 1996, avec le titre suivant : Van de Velde, mémoires inédits

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