Historien

Relire Léon Rosenthal

Par Itzhak Goldberg · Le Journal des Arts

Le 17 juin 2014 - 374 mots

Cet enseignant, critique d’art et directeur de musée est aussi l’auteur d’une œuvre protéiforme.

De Léon Rosenthal (1870-1932), les historiens d’art lisent peut-être encore aujourd’hui son histoire de la peinture Du romantisme au réalisme (1914), mais ils ont oublié que leur aîné, normalien et agrégé d’histoire, fut l’un des premiers docteurs en histoire de l’art de l’université française avec une thèse sur le romantisme. Ce militant socialiste (en 1904, il est chargé des beaux-arts au conseil municipal de Dijon) est l’auteur des biographies de David, Géricault, Daumier ou Carpaccio ou encore un critique d’art actif dans les journaux et revues de son temps. Infatigable conférencier des Universités populaires issues du dreyfusisme, Rosenthal est l’adepte d’une histoire sociale de l’art et le défenseur d’un art à la portée du plus grand nombre. Dans le même temps, Rosenthal s’engage dans le siècle suivant, en construisant une carrière d’historien de l’art professionnel. De fait, il sera à partir de 1924, à la suite d’Henri Focillon, professeur d’histoire de l’art à la Faculté des lettres de Lyon et directeur du Musée des beaux-arts de cette ville. C’est cette figure un peu délaissée que Vincent Chambarlhac, Thierry Hohl et Bertrand Tillier, chercheurs à l’université de Bourgogne (Centre Georges Chevrier), ont ravivée avec empathie et précision dans le cadre d’un programme interdisciplinaire. L’édition critique de sa correspondance, la réédition d’un petit traité de la reconstruction des villes détruites pendant la Grande Guerre constituent les principaux apports de cette vaste enquête, que vient clôturer la parution d’une monographie. Dans leur complémentarité, ces différents volumes permettent de relire des textes méconnus et de retracer le parcours d’un historien de l’art qui, par sa génération, prolonge les usages du XIXe siècle à travers les figures de l’amateur ou du critique d’art. 

Entre histoire de l’art et histoire intellectuelle et politique, la monographie et la correspondance éclairent les aléas et la teneur d’une existence placée sous le signe de la curiosité pour toutes les formes d’art – la peinture et la sculpture, la gravure, les arts décoratifs et le mobilier, l’architecture et l’urbanisme – et pour leurs moyens de diffusion. Mais, avant tout, Léon Rosenthal fut animé par le souci d’un art social qu’il défendit avec constance de la Belle Époque aux Années folles.

Léon Rosenthal, Chroniques d’art de l’Humanité, 1909-1917, Éditions universitaires de Dijon (35 €), établie par Vincent Chambarlhac, Thierry Hohl et Bertrand Tillier.
Léon Rosenthal, Villes et villages français après la Grande Guerre, Éditions Infolio (12 €).
Léon Rosenthal, Correspondance croisée, Les Presses du réel (32 €).
Léon Rosenthal (1870-1932), militant, critique et historien d’art, sous la codirection de Vincent Chambarlhac, Thierry Hohl et Bertrand Tillier, Hermann (32 €).

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°416 du 20 juin 2014, avec le titre suivant : Relire Léon Rosenthal

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