On n’y voit rien

L'ŒIL

Le 1 avril 2001 - 280 mots

Si les lecteurs d’essais concernant l’art du XXe siècle sont habitués à une approche dont le ton est parfois léger, humoristique, spirituel (ce qui n’exclut aucunement la rigueur dans la méthode et le propos), il n’en va pas toujours de même pour ceux qui estiment qu’après la Renaissance tout n’est que décadence. Non seulement l’art produit après cette période, mais les auteurs qui le défendent également. On ne peut être un historien de l’art sérieux lorsque l’on s’intéresse à un art qui n’a d’art que le nom. Or ce n’est sans doute pas un hasard si cet éminent spécialiste de l’art renaissant qu’est Daniel Arasse, également auteur de textes sur l’art contemporain, fait rejaillir l’esprit et la lettre du « vingtièmiste » dans ce recueil d’essais consacrés à l’interprétation de tableaux des XVIe et XVIIe siècles. Des œuvres de Tintoret, Cossa, Bruegel, Titien, Velázquez, sont regardées et étudiées sans ambages, sans fioritures, sans recourir à tout l’appareillage critique de l’historien traditionnel. Car il s’agit simplement de regarder les œuvres que l’on pense définitivement connaître pour y découvrir encore une nouvelle explication et s’interroger sur leur actualisation. Le savoir ne tue pas le sentiment, il l’affine. En revanche, il peut devenir un carcan positiviste qui empêche de regarder ce que des œuvres distantes de plusieurs siècles ont encore à nous enseigner. A force de croire que l’on sait, on finit par ne plus rien voir. Et à bien y regarder, comme le propose ici Arasse dans ses « descriptions » narratives, on comprend que ce que l’on savait n’est pas tout à fait ce que l’on voit.

Daniel Arasse, On n’y voit rien, éd. Denoël, 190 p., 120 F, ISBN 2-207-24917-4.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°525 du 1 avril 2001, avec le titre suivant : On n’y voit rien

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