Molanus : « Traité des saintes images »

La seconde guerre des images - Un manuel de la représentation divine

Par Alain Cueff · Le Journal des Arts

Le 1 mars 1997 - 473 mots

Reprenant les conclusions du concile de Trente, un théologien belge, Jean Vermeulen, dit Molanus, publie en 1570 un Traité des saintes images qui guide le peintre et le fidèle dans les arcanes de la doctrine catholique.

Face aux hérétiques iconoclastes, à Byzance puis dans les pays réformés du Nord, l’église catholique et romaine dut à plusieurs reprises affirmer le rôle légitime des images saintes dans l’édification des fidèles et endiguer la violence des campagnes destructrices dans les églises. Le concile de Nicée II, en 787, avait fixé quelques principes que la diffusion des idées calvinistes imposait de réactualiser. Le concile de Trente, en 1563, examina la question à nouveaux frais en reprenant le corps de la doctrine établie par Grégoire le Grand. L’une des nouveautés n’était pas d’ordre théologique mais pratique : le concile prévoyait en effet de confier aux pasteurs et aux évêques une mission de contrôle. Si les protestants planifient avec autant de soin que d’intransigeance leurs actions iconoclastes, en particulier dans les années 1570 à l’enseigne de la Révolte des Gueux de mer, manquent au clergé les outils qui lui permettraient d’instruire et de convaincre les fidèles. C’est à cette nécessité que répond le Traité  de Molanus. Né à Lille en 1533 de parents "bataves", Jean Vermeulen, dit Molanus, devient professeur à l’université de Louvain où il a fait toutes ses études. Auteur érudit, prolixe et opiniâtre, il sera, dans ce bastion catholique, un acteur essentiel de la croisade contre les réformés. Comme le souligne dans leur préface les traducteurs, son Traité "échappe pour une bonne part au genre historique comme au genre théologique : la qualité et la subtilité de son argumentation pourraient tout aussi légitimement mériter l’appellation d’ouvrage d’iconographie, de philosophie de l’histoire, d’écclésiologie appliquée et de psychologie de l’image."

La guerre des images
Avant d’en venir à un examen détaillé des principales représentations bibliques, et après un rappel de la guerre des images, Molanus prend soin de redéfinir avec précision, en se fondant sur les Pères de l’Église, la nature des images saintes, les limites de leurs attributions, leur rôle essentiel auprès des illettrés. Sa préoccupation première est au fond d’établir autant un bon usage qu’une grammaire de cette "écriture vivante". Comme les textes sacrés, la peinture parle et raconte ; elle nécessite des règles et des mises en garde qui lui permettront d’assumer au mieux sa mission de persuasion. Molanus définit le rapport entre la Bible et ses représentations non pas en termes d’illustration mais en termes d’équivalence : l’image, qui supprime les médiations, n’est pas un simple complément, un soutien à la prière, elle est bel et bien au cœur de la foi.

Molanus, Traité des saintes images, traduit du latin et présenté par François Bœspflug, Olivier Christin et Benoît Tassel, éditions du Cerf, vol. 1, 670 p., 290 F., vol. 2, 465 p., 400 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°34 du 1 mars 1997, avec le titre suivant : Molanus : « Traité des saintes images »

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