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Louis Martinez : "Je suis peut-être plus sensible aux peintres mélomanes… "

Par Laure Albernhe · L'ŒIL

Le 31 août 2020 - 762 mots

Chaque mois, Laure Albernhe, l’animatrice des Matins Jazz sur les ondes de TSF JAZZ, rencontre un musicien inspiré par les arts visuels. Ce mois-ci : Louis Martinez, guitariste et directeur du festival Jazz à Sète.

Voilà de nombreuses années que Louis Martinez œuvre pour le jazz. Guitariste discret et sensible, qui met volontiers en valeur le talent des autres, il est aussi l’heureux directeur du festival Jazz à Sète, qu’il a créé en 1985.

Quel type d’amateur d’art êtes-vous ?

Je suis un amoureux modeste de la peinture. J’ai commencé par la pratique, aux Beaux-Arts de Sète, où j’ai été inscrit à 12 ans. Je n’ai jamais pensé en faire mon métier, mais j’ai toujours gardé sur moi un carnet de croquis et une mine de plomb. J’ai fait des portraits de tous mes amis, et aussi des musiciens de jazz que j’ai croisés. Mon épouse était aussi passionnée de peinture et, ensemble, nous avons couru les expositions, dans toutes les villes et tous les pays que nous avons visités, où j’ai parfois fait d’extraordinaires découvertes, comme au Mexique, par exemple.

Quels sont les peintres que vous aimez le plus ?

Certains peintres me bouleversent, comme Nicolas de Staël ou Matisse, pour la couleur. Mais ma plus grande émotion, je l’ai vécue face aux toiles de Monet. Avant ça, c’était Turner, ma passion. En me documentant sur Monet, j’ai lu qu’il avait largement été influencé par Turner. Il y avait pour moi une continuité artistique et affective évidente. La dernière exposition que j’ai vue de lui, c’était au Grand Palais, j’en ai pleuré. Cette façon de décliner un motif en fonction de la lumière, de l’heure du jour, de la saison… De jouer avec la pluie, avec le froid, avec l’atmosphère… Je suis très sensible à la lumière dans la peinture, ça m’émeut beaucoup. C’est peut-être parce que je suis né sous le soleil de l’Algérie, au bord de la mer. J’ai toujours été attaché à cette lumière méditerranéenne que j’ai retrouvée à Sète.

C’est ce qui vous touche dans la peinture de Nicolas de Staël ?

La lumière et la couleur. De Staël était inclassable, il m’impressionne beaucoup. Il y a Chagall aussi, dont j’ai pu admirer les œuvres à Florence, par hasard, une fois que j’y séjournais. Quelle émotion de le voir là, dans un palais italien ! Je suis resté des heures à admirer son travail, avec cette saveur particulière de le voir en Italie. Chagall aimait follement la musique. Dans la commande que Malraux lui a passée pour le plafond de l’opéra Garnier, on ressent profondément l’amour qu’il avait pour la musique. Et il y a toute cette couleur, c’est magnifique. Je suis peut-être plus sensible aux peintres mélomanes…

Il y a les peintres mélomanes et les musiciens amateurs de peinture. Vous voyez un lien entre la musique et la peinture ?

Chez moi, il y a un lien ténu entre la musique et l’image. Il me semble que ce que j’ai toujours peint ou dessiné ressemble à ma musique, et cela n’est pas étonnant. Je peins et je joue tel que je suis, sans filtre ; je ne peux pas tricher. J’ai été très marqué, sur le plan pictural, par l’impressionnisme et j’ai dans l’idée que ma musique s’en ressent, qu’elle se rapproche de cette démarche. Mon dernier projet s’intitule « Influences » : il s’agit surtout des influences musicales de musiciens que j’aime, mais la musique que je compose fait toujours référence à des lieux ou des personnes, c’est très visuel.

Il faut dire qu’à Sète, la ville de l’Art modeste, vous vivez dans un environnement où la peinture est très présente.

Oui, il y a une forte présence de la peinture, avec la figure tutélaire de Soulages, qui a gardé sa maison ici, mais également avec les frères Di Rosa ou Robert Combas, qui vient régulièrement au festival Jazz à Sète. Je suis aussi lié à André Cervera, que j’ai déjà associé au festival et qui vient chaque année assister aux concerts. Cela fait maintenant une quinzaine d’années que notre histoire est liée à celle du peintre montpelliérain Jean-Paul Bocaj. Il me propose différents visuels et me laisse lui faire des observations. J’ai gardé un œil depuis les Beaux-Arts où on m’a appris que l’affiche doit être un « coup de poing ». Un dialogue s’installe chaque année, au point que nous avons fini par devenir amis. Il m’a d’ailleurs peint au printemps dernier, avec ma guitare. Il a fait toute une série d’hommages à Jazz à Sète. C’est un plaisir et un privilège de travailler avec lui.
 

À écouter
Le guitariste Louis Martinez a sorti en 2019 l’album Influences, enregistré avec Agnès Som, Gérard Poncin, Philippe Panel, Thomas Domene, Stéphane Belmondo, Mino Cenelu et Elvira Skovsang. www.louismartinez.fr
À retrouver
Laure Albernhe dans les Matins Jazz, avec Mathieu Beaudou, du lundi au vendredi, de 6 h à 9 h30 sur TSF JAZZ,la radio 100 % jazz. www.tsfjazz.com

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°736 du 1 septembre 2020, avec le titre suivant : Louis Martinez : "Je suis peut-être plus sensible aux peintres mélomanes… "

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