Les ponctuations érectiles de Pol Bury

Un éclairage méthodique sur les multiples registres du travail de l’artiste

Le Journal des Arts

Le 1 novembre 1994 - 356 mots

Dans l’attente de l’ouverture à Ostende de la rétrospective de l’œuvre de Pol Bury, le Crédit communal de Belgique publie, dans sa série des \"Monographies de l’art moderne\", un intéressant volume dû à Rosemarie Pahlke, conservatrice du Museum am Ostwall de Dortmund, à l’origine de l’exposition.

L’auteur offre un catalogue raisonné de l’œuvre de Bury, précédé d’une étude concise qui offre un éclairage méthodique des multiples registres du travail de l’artiste. Au sortir de la guerre, la mise en place d’une esthétique surréaliste conduit à l’autonomie de la pratique, à mi-chemin entre ambition philosophique et dérision ludique. Le travail du peintre tenté par l’abstraction conduit naturellement à une appropriation de l’espace par le biais des reliefs et des multiplans. Loin des violences machinistes de Tinguely, Bury impose au mouvement la fragilité de l’indicible.

Le mouvement reste potentiel. Le cinétisme trouve ici sa spécificité. Bury joue d’oscillations légères et sans fin. Au début des années soixante, Bury donne à son travail une nouvelle dimension sans renoncer à son orientation originale.

Le mouvement perturbe désormais l’environnement, selon un dialogue du cube et de la sphère que l’artiste déclinera dans des registres aussi variés que la sculpture, la fontaine, le multiple, le bijoux ou le relief mural, et dans des matériaux qui vont du bois au métal. Bury détourne par voie de cinétisation le travail de pairs. Ses mélangeurs d’images brisent aussi aisément les verticales de Mondrian que les courbes de la Vénus Anadyomède d’Ingres. Écrivain prolixe, il est perturbateur jusque dans ses réflexions critico-ludiques.

On regrettera peut-être l’édition trilingue – justifiée par des motifs économiques évidents – dans laquelle le lecteur se perd s’il s’attarde sur l’image au point d’en oublier la colonne à suivre. Au-delà de cet inconvénient, l’ouvrage de Rosemarie Pahlke s’impose, aux côtés des essais de Balthazar ou de Dore Ashton, comme un ouvrage de référence pénétrant par le parcours qui est proposé, essentiel par son catalogue raisonné. Après Evenepoel, Van den Abeele ou Marïen, la série des "Monographies de l’art moderne" est un carrefour éditorial essentiel pour la recherche en Belgique.

Rosemarie E. Pahlke, Pol Bury, Bruxelles, Crédit Communal, 262 p, 1 500 FB.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°8 du 1 novembre 1994, avec le titre suivant : Les ponctuations érectiles de Pol Bury

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