Les catalogues d’expositions de l’été

Par Pierre Pons · L'ŒIL

Le 25 juin 2015 - 820 mots

Parallèlement aux expositions estivales, plusieurs catalogues viennent de paraître. Sélection des incontournables…

Un vrai livre scientifique
À exposition de spécialiste [lire p. 100], catalogue de référence. On peut reprocher au Louvre-Lens de céder au populisme en lançant une collecte autour des objets relatifs au Racing Club de Lens, mais le musée démontre, en étudiant l’histoire des échanges artistiques entre Paris et la Toscane durant la période 1250-1320, qu’il n’a pas perdu son savoir-faire. Écrits par des spécialistes, les articles analysent les axes de circulations des œuvres et des idées dans les années 1250, la formation du goût, les échanges et leurs effets sur les manuscrits, les arts précieux et les objets liturgiques, etc. Bref, un vrai et beau catalogue scientifique !
D’or et d’ivoire, Paris, Pise, Florence, Sienne (1250-1320), Snoeck/Louvre-Lens, 320 p., 39 €.

Mona hatoum, la référence
Jusqu’à présent, les éditeurs francophones ne se sont pas bousculés pour éditer des ouvrages sur Mona Hatoum. On appréciera donc doublement l’initiative du Musée national d’art moderne qui, parallèlement à l’exposition qu’il lui consacre cet été, publie un important catalogue de cette artiste née à Beyrouth en 1952 de parents palestiniens, qui a dû s’exiler en Angleterre en 1975 après le déclenchement de la guerre du Liban. Huit essais, dont un de son fidèle exégète Guy Brett, sont consacrés à cette plasticienne pluridisciplinaire. À noter la qualité esthétique des reproductions, rare quand il s’agit d’art contemporain.
Sous la dir. de Christine Van Assche, Mona Hatoum, Centre Pompidou, 198 p., 35 €.

Jacques-Émile blanche inédit

Si la peinture de Jacques-Émile Blanche n’est pas la plus novatrice qui soit, le peintre est, on le sait, passionnant. Il a côtoyé et portraituré tous les artistes et les intellectuels de son temps . Il a même réalisé les décors pour la Biennale de Venise de 1912, comme le rappelle le catalogue de l’exposition du Palais Lumière à Évian [lire p. 122]. Mais ce nouvel ouvrage dépasse le seul caractère mondain de Blanche pour pousser plus loin l’étude de son œuvre, sous l’impulsion du Musée des beaux-arts de Rouen. Les essais qui le composent, comme celui sur « Un homme de droite », sont inédits et bien menés. 
Jacques-Émile Blanche, Peintre, écrivain, homme du monde, Silvana Editoriale/Palais Lumière, 35 €.

Van gogh en pleines pages
L’exposition d’été de la Fondation Van Gogh à Arles sur « Les dessins de Van Gogh » [lire p. 113] est accompagnée par l’édition d’un très joli catalogue chez Actes Sud, maison d’édition arlésienne. Si le sujet des « influences et des innovations » chez l’artiste n’est pas neuf, il reste toutefois relativement récent, suffisamment pour rendre cet ouvrage pertinent. Le texte, un essai signé d’un des spécialistes mondiaux du peintre, ancien directeur des collections du Musée Van Gogh d’Amsterdam, esquisse « à grands traits » l’ensemble de la carrière du dessinateur, qui réalisa près de 1 200 dessins. La figure humaine, les travaux des champs, les paysages, etc., y sont abordés chapitre après chapitre. Les reproductions, souvent en pleine page, sont superbes. Le fait qu’elles nous rapprochent au plus près des feuilles de Vincent est un véritable enchantement pour les yeux.
Sjaar Van Heugten, Les Dessins de Van Gogh, influences et  innovations, Actes Sud, 154 p., 30 €.

Garouste, plus qu’un catalogue
Gérard Garouste, En chemin, publié à l’occasion de l’exposition de la Fondation Maeght [lire p. 122], n’est pas à proprement parler un catalogue, ni même une monographie, mais un superbe ouvrage qui s’impose tant par ses choix que par ses reproductions. Ses choix tout d’abord : après un court essai d’Olivier Kaeppelin, il faut saluer la première partie du livre consacrée aux carnets de dessins et de notes de Garouste. L’impression de ce chapitre sur un papier mat pour donner la sensation au lecteur de tourner les pages des carnets est proprement judicieuse. Une deuxième partie aborde l’œuvre du peintre suivant quatorze variations intitulées « Le Talmud de Gérard Garouste », pertinentes pour qui connaît l’œuvre de l’artiste. Les reproductions enfin : innombrables, elles sont d’une qualité exceptionnelle. Assurément l’un des très beaux livres de l’été !
Gérard Garouste, En chemin, Fondation Maeght/Flammarion, 288 p., 39,90 €.

Eloge de la biographie
essai En 2014, Jean-François Chevrier faisait sensation à Madrid avec son exposition« Formes biographiques, construction et mythologie individuelles » qui interrogeait les modèles d’expériences biographiques dans l’art. Cet été, il en prolonge le propos au Carré d’art de Nîmes, en se tournant cette fois vers la période contemporaine. L’exposition est accompagnée d’un catalogue dont il est facile d’évaluer la volonté d’autonomie par rapport au support de l’exposition. Son format réduit, sa pagination élevée derrière sa couverture souple en font d’ailleurs davantage un essai qu’un catalogue classique. À la lumière du « Je suis l’autre » de Nerval, Chevrier regarde ainsi du côté des Demeures d’Étienne-Martin (qui donnèrent lieu aux « mythologies individuelles » de Szeemann), d’Artaud, d’Ernst, de l’actionnisme viennois, de Lygia Clark et de Broodthaers, dont les analyses forment autant de petits chapitres montrant avec intelligence la pluralité des formes biographiques dans l’art contemporain.
Jean-François Chevrier, Formes
biographiques, Hazan, 392 p., 35 €. 

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°681 du 1 juillet 2015, avec le titre suivant : Les catalogues d’expositions de l’été

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