Musée

Les Arts déco version papier

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 20 octobre 2006 - 684 mots

L’institution se lance dans une dynamique politique éditoriale. Sept ouvrages paraissent à l’occasion de sa réouverture.

Pas moins de sept ouvrages ont paru à l’occasion de la réouverture, en septembre, du Musée des arts décoratifs à Paris, reflétant la nouvelle ambition éditoriale de la maison. Parmi ceux-ci, trois mettent en lumière une partie du fonds, partie infime cependant en regard des quelque 150 000 objets qui le composent aujourd’hui. Les deux premiers ouvrages tiennent davantage lieu de « catalogues raisonnés ». Ainsi, Chefs-d’œuvre du musée des arts décoratifs réunit cent cinq pièces phares du début du XIIIe siècle à nos jours, d’un aquamanile en bronze – objet liturgique destiné aux ablutions – à la Kaleidoscope House, maison de poupée contemporaine créée en 2001 par l’artiste Laurie Simmons et l’architecte Peter Wheelwright. Ce déroulé chronologique permet de mettre côte à côte l’extraordinaire chiffonnier qu’André Groult avait réalisé pour l’Exposition internationale de 1925 et la commode haute Pod of Drawers du designer australien Marc Newson (1999, modèle créé en 1987). Le premier est précieusement habillé d’ivoire et de galuchat tandis que la seconde, en plaques d’aluminium rivetées, évoque un corps meurtri, truffé de points de suture.

Histoires de jouets
Le deuxième livre, Céramiques XXe siècle, pratiquement construit sur le même plan que le premier, est enrichi par un historique de la céramique française, avant et après 1950. Y sont présentées environ quatre-vingts pièces, depuis un merveilleux vase en grès d’Henri Simmen (vers 1911) jusqu’à une théière surréaliste signée Wieki Somers (2004), en biscuit de porcelaine et en forme de crâne d’animal.
Le dernier opus, beaucoup plus joyeux, est intitulé Au pays des jouets, 100 ans d’aventures. Ce n’est pas tant le thème qui rend la lecture d’office attrayante, mais la manière dont les jouets y sont présentés. Ce livre semble avoir été conçu comme un petit film d’animation avec, on l’imagine, un vrai story-board. Un monde, celui des jouets, se met en branle dès lors qu’un autre, celui des hommes, s’est assoupi. Et le monde des jouets est décidément vaste : baigneurs et robots, dînettes et mobilier miniature, ours en peluche, jeux de construction, maisons de poupée, voitures de course, trains électriques, soucoupes volantes, soldats de plomb, ménageries de bois ou de plastique… « La limite (dans le domaine avide des désirs d’un enfant) est très proche de l’infini », observe l’auteur, Alberto Manguel, qui a écrit une série de textes brefs mais sensibles et souvent drôles, analysant avec justesse les différentes familles de jouets. Ces derniers sont, pour l’enfant, des « modèles transitoires » dans ses tentatives d’appréhender le monde : « Ce que nous pouvons tenir en main est la mesure de notre compréhension », estime Manguel.
Les jouets ont été rassemblés à dessein pour composer des petites saynètes hyperréalistes, tantôt loufoques, tantôt effrayantes. Chaque double page fait l’objet d’une scénographie minutieuse réglée par Jean Haas, décorateur de théâtre, lequel a œuvré pour des metteurs en scène comme Jacques Nichet ou Hans Peter Cloos. On évite ainsi le piège de la présentation clinique sur fond blanc et c’est très réussi. En tout, près de 500 jouets – sur les quelque 12 000 pièces que compte la collection – ont joué les figurants d’un jour. L’un des plus anciens est Frozen Charlotte, une poupée allemande en porcelaine peinte datant de 1870. L’un des plus récents, une autre poupée baptisée Dora (2005) du nom du dessin animé « Dora l’exploratrice », a été lancé par l’Américain Fisher Price, mais est fabriqué en… Chine, comme le sont aujourd’hui 70 % de la production mondiale. Entre ces deux extrêmes défile une série de personnages : Félix le Chat, Bécassine, Pinocchio, Babar, Pollux, G.I. Joe, Barbie, Goldorak, Superman, Buzz l’Éclair… Tiens, une fois n’est pas coutume, Mickey n’a pas été invité. Trop people ?

- CHEFS-D’ŒUVRE DU MUSÉE DES ARTS DÉCORATIFS, éd. Les Arts décoratifs, 2006, 224 p., 39 euros, ISBN 2-901422-86-1. - CÉRAMIQUES XXe SIÈCLE, éd. Les Arts décoratifs, 2006, 192 p., 39 euros, ISBN 2-901422-84-5. - AU PAYS DES JOUETS, 100 ANS D’AVENTURES, éd. Xavier Barral/Les Arts décoratifs, 2006, photographies de Michel Pintado, 224 p., 39,90 euros, ISBN 2-915173-12-5.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°245 du 20 octobre 2006, avec le titre suivant : Les Arts déco version papier

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