Henri Matisse : gouaches découpées

Par Marie Maertens · L'ŒIL

Le 1 février 2004 - 389 mots

« Cette œuvre m’a demandé quatre ans de travail exclusif et assidu et elle est le résultat de toute ma vie active. Je la considère malgré toutes ses imperfections comme mon chef-d’œuvre. » C’est ainsi que Matisse décrivait sa réalisation pour la chapelle de Vence. L’éditeur Bernard Chauveau a choisi d’en relater l’ensemble des gouaches découpées dans neuf cahiers. Six d’entre eux sont consacrés aux chasubles et ornements liturgiques selon les couleurs employées durant l’office, respectivement le blanc, le rose, le vert, le violet, le rouge et le noir, les trois suivants reprendront les divers projets de vitraux. Un choix chronologiquement inversé par conséquent, puisque Matisse mena ses recherches pour les vitraux en 1949 et s’attela aux vêtements et ornements sacerdotaux à la fin de 1950. L’inspiration en remonte aux sources océaniennes, en souvenir de son voyage à Tahiti et synonymes pour lui d’âge d’or, de paradis perdu. Palmes, feuilles d’arbres à pain, coraux, poissons et étoiles de mer se mêlent ainsi aux formes de flammes dentelées et les chasubles, manipules, bourses ou voiles évoquent davantage la flore et l’univers marin que le monde religieux. L’ensemble acquiert pourtant une pureté, une impression d’apesanteur et d’immatérialité. Ces reproductions des gouaches découpées, elles-mêmes exposées pour la plupart au musée Matisse de Nice, ont été conçues à partir de chutes conservées à l’abri de la lumière depuis cinquante ans et sont pour ainsi dire plus authentiques et plus fraîches que celles du musée.
Elles sont exécutées au pochoir à la gouache, une technique qui se révèle la plus fidèle pour restituer la vibration des couleurs, également employée pour le célèbre Jazz de 1947 de Tériade. Ce travail minutieux, accompli sur papier vélin par un atelier d’art, nécessite, pour chaque cahier édité à mille exemplaires, trois mois de travail, expliquant que la production se déroulera jusqu’en 2005. Le lecteur peut déjà savourer les cahiers dédiés aux couleurs blanche et rose, en attendant la sortie de Chasuble verte au printemps. Afin de ne pas troubler sa méditation, seules quelques phrases extraites de la correspondance ou des écrits de l’artiste ponctuent l’ensemble. Les cahiers n’étant pas reliés, les pages peuvent être détachées et exposées, afin que chacun ait un Matisse dans son salon !

Henri Matisse : les gouaches découpées de la chapelle de Vence, éditions Bernard Chauveau, 2003, 9 cahiers, 20 p., 52 euros chaque.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°555 du 1 février 2004, avec le titre suivant : Henri Matisse : gouaches découpées

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