Musique - Radio & télévision

De l’oreille à L’Œil - La chronique de Laure Albernhe / TSFJAZZ.com

Charlie Parker, génial influenceur

Par Laure Albernhe · L'ŒIL

Le 8 février 2022 - 449 mots

« Ma méthode de dessin ressemble beaucoup à l’improvisation du jazz. J’improvise avec les lignes et avec les couleurs comme, par exemple, Charlie Parker improvisait avec son saxophone. Il n’a pas toujours été bien compris non plus. »

Charlie Parker, Bird songs, documentaire de Jean-Frédéric Thibault © Arte
Charlie Parker, Bird songs, documentaire de Jean-Frédéric Thibault.
© Arte

Lorsqu’en 1959, Jean Cocteau évoquait devant la caméra sa façon de dessiner ou d’écrire, ce qui revenait à la même chose pour lui, il écoutait la musique du saxophoniste Charlie Parker. Il disait « Parkèr », comme à l’époque on disait aussi en France « Joséphine Bakèr ». Ce jazz, il avait été l’un des premiers à le défendre comme « musique de chambre », c’est-à-dire plus seulement comme une musique à danser. Mais revenons à Parker, car on revient toujours à Parker, et pas seulement pour sa musique. Il était l’un des dieux au panthéon de Basquiat, on le sait. Dans le documentaire Charlie Parker, Bird Songs, le saxophoniste Archie Shepp évoque aussi l’influence du maître bien au-delà de la sphère du jazz : « Les écrivains et les peintres ont été influencés par sa musique. Jacob Lawrence, Romare Bearden parmi les peintres noirs. » Les peintres du mouvement de la Harlem Renaissance, dont le pinceau a swingué au rythme des orchestres de danse et du be-bop naissant. Ce sont de formidables témoins de ce temps où le jazz tournait la tête des noctambules new-yorkais. Mais Parker, Archie Shepp le développe, a aussi inspiré la Beat Generation, Kerouac et les autres, à qui il a soufflé sa vision d’une vie libre, accro aux drogues et au sexe. « Make Love, Not War. » Parker avait été objecteur de conscience, il avait refusé l’armée, il était aussi « un père et un initiateur du mouvement hippie ». Ça surprend, car on est habitué à le voir dans ses costumes sombres. C’était l’époque. Les hommes noirs revêtaient les habits de la middle class blanche, espérant encore se fondre dans la masse, peut-être. Mais Bird ne s’est fondu dans rien. Si le monde l’a épuisé, c’est qu’il l’a dévoré lui-même, avec un appétit d’ogre. Lorsqu’il est mort – dans un éclat de rire –, son corps était si usé par les excès de toutes sortes que le médecin légiste lui a donné vingt ans de plus que son âge. C’était en 1955, Charlie Parker avait 34 ans. En quelques années, il n’était pas seulement devenu l’un des plus grands génies du jazz, le guide de tous les saxophonistes qui continuent, génération après génération, à suivre sa voie, il avait, pour citer une dernière fois Archie Shepp, joué un rôle déterminant dans le changement de valeurs de la culture américaine. « Au fond, disait Bird, la musique c’est la mélodie, l’harmonie et le rythme. Mais on peut faire beaucoup plus que ça, il y a mille manières de s’exprimer. »

Charlie Parker, Bird Songs,
Un documentaire de Jean-Frédéric Thibault, 50 min, jusqu’au 10 mars 2022 sur Arte.tv.
À retrouver.
Laure Albernhe et Mathieu Beaudou dans Les Matins Jazz, du lundi au vendredi, de 6 h à 9 h 30 sur TSF JAZZ, la radio 100 % jazz. www.tsfjazz.com

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°751 du 1 février 2022, avec le titre suivant : Charlie Parker, génial influenceur

Tous les articles dans Médias

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque