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De l’oreille à L’Œil - La chronique de Laure Albernhe - TSF JAZZ

Berberian, le vibrato du trait…

Par Laure Albernhe · L'ŒIL

Le 27 mars 2023 - 480 mots

« Depuis que je fais des concerts dessinés, j’essaye de fonctionner comme un musicien. C’est-à-dire que, sur scène, je n’ai pas le temps de faire des corrections.

Je suis obligé d’être dans l’instant présent, ce qui n’est pas forcément naturel pour un dessinateur. » Ça ne fait que quelques années que le dessinateur Charles Berberian participe à ce type de concert associant sur scène musiciens et dessinateurs, mais il a toujours dessiné la musique et ceux qui la créent. Dans le numéro 3 de sa revue personnelle Wah Wah, qui est entièrement occupé – comme son auteur – par la musique, il raconte comment il s’est mis à écouter des disques : avec l’arrivée des premiers émois amoureux, et « les musiques qui les transcendent. » Le dessinateur-guitariste-chanteur est donc, au sens littéral, un « amoureux » de la musique. En 2004, il publiait l’album Playlist, suivi en 2011 de JukeBox, comme autant de déclarations passionnées à cette musique qu’il écoute, mais qu’il pratique aussi, seul ou en bande. À Angoulême, où il est présent toute l’année dans l’exposition « Rock ! Pop ! Wizz ! Quand la BD monte le son », on peut le voir – dessiné – dans un autoportrait avec sa guitare, mais aussi avec Les Hommes du président, ce groupe monté dans les années 1990 avec d’autres dessinateurs, dont le « président » (du Festival international de la BD d’Angoulême) de l’époque, Frank Margerin, et d’autres qui ont suivi (lui-même, notamment, ou Jean-Claude Denis, qui a aussi un alter ego musical). Il y a trois ans, Charles Berberian a publié sous son nom l’album Tout pour le mieux, arrangé par le multi-instrumentiste Marcello Giuliani, avec qui il partage son goût pour le blues du Delta, et sur lequel il a invité le trompettiste de jazz Erik Truffaz. Musicien, donc, Charles Berberian l’est aussi. Mais lorsqu’il s’exprime, il continue de parler en dessinateur mélomane qui tente désormais, dans sa pratique du dessin, de « tenter l’impossible », ce qu’il emprunte aux musiciens : « Fabriquer l’instant commun. Je n’improvise pas vraiment, mais je m’adapte à chaque nouveau concert. Rien n’est jamais pareil. » Et sa pratique de la scène a aussi fait évoluer technique vers l’aquarelle et l’utilisation de gros pinceaux. Il choisit son matériel de dessin comme un musicien son instrument le plus adapté à la scène. Peu à peu, ces nouveaux outils sont entrés dans son atelier, et son approche du dessin a changé : « Les musiciens sont souvent fascinés par ce qu’ils n’arrivent pas à faire : peindre avec des sons. Mais la force de la musique, c’est l’abstraction. Si les sons racontent quelque chose, ce sont des sentiments. Dans mon trait, aujourd’hui, je cherche la vibration, comme on peut s’attacher au grain de la voix dans une langue qu’on ne connaît pas. Ce qui m’importe, ce vers quoi je tends, c’est que le trait soit plus important que le sujet qu’il représente ou l’histoire qu’il raconte. »

À retrouver.
Laure Albernhe et Mathieu Beaudou dans Les Matins Jazz, du lundi au vendredi, de 6 h à 9 h 30 sur TSF JAZZ, la radio 100 % jazz. www.tsfjazz.com

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°763 du 1 avril 2023, avec le titre suivant : Berberian, le vibrato du trait…

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