Art moderne

DESSIN

Traits en forme

Par Stéphane Renault · Le Journal des Arts

Le 26 avril 2018 - 597 mots

PARIS

La galerie Jeanne Bucher Jaeger présente un ensemble de dessins de sculpteurs historiques et contemporains liés à son histoire.

Paris. Esquisse d’une œuvre à venir ou œuvre à part entière, le dessin est depuis toujours pour les artistes, quelle que soit la technique utilisée, une forme d’expression privilégiée, propice à faire naître les volumes d’un drapé, les reliefs d’un corps, les traits d’un visage, le plein et le vide d’une architecture, une figure abstraite. Ce, plus encore chez les sculpteurs, dont l’œil et l’esprit sont exercés à percevoir et traduire le réel, ou un univers, en trois dimensions. « L’idée d’organiser une exposition de dessins de sculpteurs dont les parcours sont intimement liés à l’histoire de la galerie, tant par le passé que par l’actualité présente, a germé pendant près de deux années, raconte Emmanuel Jaeger. Nous étions passionnés par le fait de montrer, au moment des différents salons consacrés au dessin à Paris, comment de grands sculpteurs, habitués à travailler en trois dimensions, parviennent à transcrire sur une feuille de papier, par l’encre, le crayon ou le fusain, la puissance créatrice présente dans leur sculpture. » Cette tension du volume sur la feuille de papier fait tout l’intérêt de cette exposition qui rassemble des œuvres d’une vingtaine d’artistes historiques et contemporains. L’occasion de voir – et d’acquérir – des dessins de noms habituellement davantage exposés dans les musées, auxquels s’ajoutent quelques prêts de collections privées.

On peut ainsi admirer La Fortune (1906) de Rodin (80 000-90 000 euros), dont le frère de Jeanne Bucher, Pierre, exposa les œuvres ; Femme couchée (1943) d’Henri Laurens (15 000 euros), correspondant à la période où l’artiste fut montré à la galerie, alors boulevard du Montparnasse, pour son unique exposition sous l’Occupation ; un étonnant portrait à la sanguine d’un de ses camarades de lycée signé du jeune Dubuffet (1917), âgé seulement de 16 ans – la première œuvre connue de l’artiste, auquel la galerie consacra une vingtaine d’expositions monographiques à partir de 1964. Deux dessins de Giacometti permettent, quant à eux, de mesurer le chemin parcouru entre ce Bruno Lisant réalisé en 1928 et l’exceptionnel Mère de l’artiste, Stampa (1951), dans lequel le crayon semble engagé dans une tentative sans cesse recommencée pour capter la présence fuyante de son modèle. Un chef-d’œuvre proposé à 230 000 euros, l’œuvre la plus chère. Cofondateur de dada à Zurich en 1916, le peintre et sculpteur Jean Arp se vit consacrer par Jeanne Bucher plusieurs expositions entre 1927 et 1939. Un dessin (1920) illustre ici ce long compagnonnage, comme un autre de Jacques Lipchitz, l’un des artistes dont l’œuvre a conduit Jeanne Bucher à ouvrir sa galerie en 1925. Exposé pour la première fois à Paris au printemps 1939 aux côtés de Vieira da Silva et Arpad Szenes, le sculpteur hongrois Étienne Hajdu est représenté par une Grande demoiselle à l’encre de Chine (dessins entre 8 000 et 20 000 euros). « Le dessin, dit Eugène Dodeigne, est le fruit de ma sculpture. » Ses dessins sont proposés entre 11 000 et 20 000 euros, ceux de Dani Karavan à 10 000 euros et de Paul Wallach, dont une sculpture sera inaugurée le 19 mai à Strasbourg, à 5 000 euros.

Enfin, sans être exhaustif, les collectionneurs peuvent se laisser tenter par des dessins de Susumu Shingu (5 000 euros). La galerie consacrera dans son espace du Marais une exposition à l’artiste japonais à partir du 15 mai, en parallèle de celle que présente le Mudam Luxembourg.

« Dessins de sculpteurs » , jusqu’au 19 mai, galerie Jeanne Bucher Jaeger, Espace Saint Germain, 53 rue de Seine, 75006 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°500 du 27 avril 2018, avec le titre suivant : Traits en forme

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