PARIS
À Saint-Germain-des-Prés, le rendez-vous incontournable des arts premiers poursuit sa mue : sans rompre avec l’esprit qui l’anime depuis plus de vingt ans, il cherche à élargir son public et ses horizons.
Paris. À l’heure où les grandes places du marché de l’art tribal cherchent à renouveler leur public, Parcours des mondes revient du 9 au 14 septembre, avec une 24e édition qui confirme Paris comme le dernier bastion européen et même mondial, de la spécialité. En effet, selon les années, la France pèse entre 60 et 85 % dans le marché mondial pour cette discipline, selon le rapport Artkhade.
Dans le dédale de galeries de Saint-Germain-des-Prés – principalement dans les rues de Seine, des Beaux-Arts et Mazarine –, le salon mise cette année encore sur une sélection portée par des marchands historiques et quelques enseignes montantes, entre fidélité aux arts d’Afrique et d’Océanie et percée croissante des arts contemporains extra-européens. Dans un contexte où la pression sur la provenance et la documentation des pièces – notamment de la part des musées et institutions – n’a jamais été aussi forte, la manifestation reste un thermomètre de l’état du marché, mais révèle aussi les tensions entre héritage historique et recomposition du marché.
Cette année, ils sont 53 exposants, contre 58 l’an passé. Certains n’ont pas réitéré leur venue, comme les galeries américaines Pace African & Oceanic et Joe Loux, l’enseigne belge Grusenmeyer et Woliner ou la française Marguerite de Sabran. En revanche, la section Showcase accueille trois nouveaux exposants : Ciprian Ilie (Royaume-Uni), Alexandre & Patric Claes (Belgique) et la galerie parisienne OIA (Hervé Cadet).
Les arts premiers classiques ont la part belle, avec des exposants historiques, comme Bernard Dulon, qui, autour du collectionneur Max Itzikovitz, réunit des fragments de sculptures où les absences sculptent la présence. Figures tronquées, torses rescapés, ces formes blessées portent la trace du temps, à l’image d’une effigie d’ancêtre Suku de la République démocratique du Congo (800 000 €) (voir ill.). Philippe Ratton dévoile une figure de reliquaire Kota-Obamba (Gabon), quand Martin Doustar (Londres) expose un fétiche à clous Nkisi Nkonde, Ethnie Yombe, RDC (autour de 200 000 €) et que Michael Hamson a apporté de Californie une figure rituelle d’époque précontact, de la côte Nord de Nouvelle-Guinée, provenant de l’ancienne collection Jolika.
L’ancrage du contemporain se confirme, en adéquation avec la volonté d’Yves-Bernard Debie, aux commandes de la manifestation depuis 2022 :« Notre ambition est claire : ouvrir Parcours des mondes à de nouvelles générations de marchands et de collectionneurs, tout en créant un dialogue fécond entre les arts “classiques” et la création contemporaine. » Aux galeries pionnières – Vallois et Claes Contemporary & Modern – s’ajoute cette année Magnin-A, qui présente un dialogue entre les peintures d’Estevão Mucavele et les figures de Seyni Awa Camara. Christophe Person, avec « Surréalités africaines », réunit Mouss Black, Raymond Tsham et Thiémoko Claude Diarra. Vallois 35 propose un solo show du sculpteur Andrey Tischenko.
Plusieurs galeries explorent les liens entre art ancien et création contemporaine. Duende Art Projects confronte reliquaires Kota et sculptures de Franz West ; Dierking & Woerner fait dialoguer Lucio Fontana avec des œuvres classiques d’Afrique et d’Asie. Claes Contemporary & Modern associe art africain ancien et peintures de Vitshois Mwilambwe Bondo, tandis qu’Abla et Alain Lecomte invitent Jim Skull à confronter ses pièces aux objets de la galerie.
Chez Julien Flak, Harry Nuriev (Crosby Studios) signe une scénographie contemporaine pour les œuvres d’Afrique, d’Océanie et des Amériques. L’Asie contemporaine est également représentée : à la galerie Mingei, mais aussi chez OIA, qui rejoint le parcours avec des artistes issus des diasporas d’Asie du Sud-Est, dont Su Mei Yu (Taïwan).
Les objets du Grand Nord gagnent du terrain d’année en année. Une fois n’est pas coutume, la galerie Vallois propose une centaine d’objets traditionnels (amulettes et figurines anthropomorphes ou zoomorphes) provenant des peuples inuits et samis, couvrant une période allant de 200 ans avant notre ère jusqu’au XXe siècle. Parmi eux, une tête Okvik (voir ill.), Alaska, île Saint-Laurent, mer de Béring 200 av. J.-C.- 200 apr. J.-C., en ivoire de morse sculpté (60 000 €). D’autres exposants présentent des objets issus de cette région du monde, comme Franck Marcelin, avec un masque facial d’orateur en bois de cèdre rouge, population kwakiutl, côté centrale de la Colombie-Britannique (Canada), de l’ancienne collection Merton Simpson (48 000 €) ; ou encore Julien Flak et Patrick & Ondine Mestdagh.
À ne pas manquer non plus, l’exposition organisée par le marchand et collectionneur canadien Jacques Germain – mais juste pour le plaisir des yeux car rien n’est à vendre – à la galerie Gradiva. Intitulée « Au Cœur de l’Afrique Classique », celle-ci réunit une soixantaine de pièces d’art classique africain sélectionnées par le marchand et mises en scène par René Bouchara.
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Parcours des mondes, entre tradition et renouveau
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°660 du 5 septembre 2025, avec le titre suivant : Parcours des mondes, entre tradition et renouveau





