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TRANSPARENCE FINANCIÈRE

Londres impose de nouvelles vérifications aux marchands d’art

LONDRES / ROYAUME-UNI

Pour les transactions supérieures ou égales à 11 800 euros, les marchands devront confronter l’identité des clients aux listes des personnes sanctionnées.

Londres. À partir du 14 mai, de nouvelles réglementations britanniques vont accroître la charge de travail en matière de due diligence (« vérifications nécessaires ») des marchands d’art. Ces derniers devront désormais déclarer auprès de l’Ofsi (l’organisme chargé de l’application des sanctions financières) les transactions et le stockage d’œuvres d’art d’une valeur de plus de 10 000 livres sterling (près de 11 800 €) qui impliquent des personnes ou des entités sanctionnées par le gouvernement britannique.

S’il existait déjà une obligation de vérification, le seuil imposé, ainsi que l’inclusion du stockage dans les vérifications, constituent des nouveautés pour le secteur. De façon concrète, il s’agira de contrôler l’identité et l’adresse des clients puis de vérifier si leur nom figure sur les listes des sanctionnés, tout en s’assurant qu’il ne s’agit pas d’homonyme. Les marchands devront aussi regarder si leurs clients ne sont pas utilisés comme prête-nom pour un individu sanctionné.

L’absence de déclaration est aussi répréhensible

Ces réglementations viennent compléter l’application d’une loi votée en 2018 et dont l’objectif était de définir un régime britannique en matière de sanctions, après la sortie de l’Union européenne. Les marchands d’art ont été ajoutés alors que l’Agence nationale du crime (NCA) a émis une alerte orange visant le secteur. Le marché de l’art est déjà considéré comme un risque élevé pour le blanchiment d’argent depuis 2021, mais la NCA a exprimé des inquiétudes concernant l’utilisation de stockages d’œuvres pour éviter les sanctions à partir de 2024. Adrian Searle, directeur du Centre national de lutte contre la criminalité économique au sein de l’organisme, a rappelé l’attractivité du marché de l’art pour le blanchiment d’argent. « Le secteur doit redoubler de vigilance et assumer son rôle de gardien du marché de l’art légitime », a-t-il affirmé.

L’autre nouveauté, c’est que l’absence de déclaration pourra aussi entraîner une peine d’emprisonnement (d’une durée de six mois maximum), ainsi qu’une amende, ce qui engendre des inquiétudes dans le secteur. « Le gouvernement recommande la mise en œuvre d’un programme de conformité solide, mais cela accroît la charge imposée aux professionnels de l’art, souligne Karen Sanig, cheffe du département du droit des arts au sein du cabinet d’avocats britannique Mishcon de Reya. Nombre d’entre eux disposent déjà d’un budget serré et de ressources limitées à consacrer à des exigences administratives de plus en plus ardues. »

Paul Hewitt, le directeur de la Société londonienne des marchands d’art (SLAD) s’interroge, de son côté, sur la pertinence du seuil de 10 000 livres sterling par transaction. « Ce seuil devrait être augmenté à 30 000 livres [35 000 euros] pour réduire la charge sur les petites entreprises où le risque de blanchiment d’argent est plus faible, indique-t-il. Les réglementations en la matière devraient être repensées pour se concentrer sur les transactions à haut risque. » Le directeur de la Slad considère d’ailleurs que ces mesures entrent en contradiction avec les appels à la dérégulation lancés par le gouvernement britannique pour stimuler la croissance. « Ces réglementations sont prises très au sérieux par les membres de la Slad, mais nombre d’entre eux les considèrent comme un frein au développement de leur entreprise. »

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°655 du 9 mai 2025, avec le titre suivant : Londres impose de nouvelles vérifications aux marchands d’art

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