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L’effet Poiret

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 27 mai 2005 - 561 mots

Succès phénoménal pour la garde-robe du couturier.

 PARIS - Environ 7 000 visiteurs, musées, professionnels de la mode, collectionneurs privés et admirateurs inconditionnels sont venus du monde entier pour admirer les créations du couturier Paul Poiret (1879-1944). Plus de 500 pièces des années 1910-1920, essentiellement la garde-robe de la famille Poiret, conservée jusqu’alors par la petite-fille du créateur, ont été dispersées les 10 et 11 mai dans une grande salle comble à Drouot. Tous les lots ont été emportés. Estimé environ 600 000 euros, l’ensemble a été soufflé pour près de 1,9 million d’euros ! « Cela a été la redécouverte d’une création avant-gardiste très forte. Un moment magique…», témoigne l’expert Françoise Auguet. Selon Catherine Join-Diéterle, directrice du Musée Galliera, « Paul Poiret avait une vision au-delà de son temps, avec une liberté à l’égard de la mode qui le distingue de ses contemporains plus conformistes. Ses créations sont d’un chic et d’une désinvolture qui n’étaient pas de mise au début du XXe siècle. De ses influences multiples (la Chine, la Perse, la Russie), il a repris des tissus rapportés de ces régions pour réaliser des modèles originaux, et s’en est à la fois inspiré pour d’autres créations. Enfin, il a su travailler avec des artistes. Poiret annonce les créateurs de ces dernières décennies : Margiela, Elisabeth de Senneville ou encore Castelbajac pour les burnous ». Une poignée d’acheteurs étrangers, souvent des intermédiaires pour institutions et collections privées internationales, ont misé sans limitation de fonds, ce qui explique quelques pics d’enchères impressionnants.
Le manteau du soir modèle La Perse de 1911, réalisé dans un tissu dessiné par Raoul Dufy et estimé 10 000-15 000 euros, annoncé comme le clou de la vente, a été vendu 72 200 euros. Plus fort, un manteau d’automobile de 1914, en épaisse toile de lin et soie ivoire, qui partait de la même estimation, s’est envolé à 131 650 euros, un record mondial pour un vêtement de haute couture. L’autre record de la vacation concerne des souliers du soir, modèle Le bal de 1924, exécutés spécialement pour Mme Poiret d’après un carton de Guy Arnoux par Perugia, emportés 40 912 euros, cinq fois l’estimation haute. Le Costume Institute du Metropolitan Museum of Art de New York, le Fashion Institute of Technology de New York (FIT), le Fine Art Museum of San Francisco (FAMSF), le Musée de Bruxelles, le nouveau Musée de la mode au Chili et des institutions en Asie se sont battus pour décrocher les plus belles pièces face à de coriaces marchands américains .

Vêtements pour enfants
Les musées français se sont démenés pour acquérir plusieurs pièces de ce couturier de premier plan. Côté français, 57 préemptions ont été enregistrées : 18 lots au profit du Musée des arts décoratifs, dont l’attention s’est d’abord portée sur les papiers peints de l’Atelier Martine, 7 pour le Musée des beaux-arts et de la dentelle à Calais et 6 autres en faveur du Musée international de la parfumerie de Grasse. Le plus gros contingent de préemptions revient au Musée Galliera. « Notre collection comportait déjà 72 pièces (sans compter les accessoires), rapporte Catherine Join-Diéterle. Nous l’avons complétée avec 26 lots de la vente. Nous ne voulions pas mettre tous nos crédits sur une seule grosse pièce onéreuse, surtout compte tenu de la concurrence, à savoir le musée du Chili qui a acheté à des prix exorbitants. »

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°216 du 27 mai 2005, avec le titre suivant : L’effet Poiret

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