Allemagne - Galerie

L’art français s’installe à Berlin

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 22 septembre 2006 - 516 mots

Dans la foulée de l’expérience « Paris Calling » à Londres, la France se livre jusqu’au 31 décembre à une opération de charme dans la capitale allemande sous le label « Art France Berlin ». 

Entre une exposition au Martin-Gropius-Bau, à Berlin, de peintures françaises puisées dans les collections du Musée national d’art moderne, une installation de Claude Lévêque à la Hamburger Bahnhof et un essaimage de plusieurs projets dans la ville, une centaine d’artistes français viennent se rappeler au bon souvenir des Germaniques.

Car, même si ces derniers sont réputés chauvins, il leur est arrivé de guigner de notre côté du Rhin. L’amateur Wilhelm Uhde compte parmi les premiers clients de l’écurie cubiste de Daniel-Henry Kahnweiler. Quelques décennies plus tard, Karl-Heinrich Müller et son compatriote Günther Sachs constituèrent deux des plus grosses collections de Jean Fautrier. Un Peter Ludwig ou un Wolfgang Hahn ont soutenu les Nouveaux Réalistes, alors même que les Français restaient campés sur l’abstraction. Depuis, l’appétit des collectionneurs allemands s’est replié sur leur propre terreau ou s’est tourné vers l’Amérique.

Ce n’est pourtant pas faute, pour les artistes français, de s’établir massivement outre-Rhin. Michael Faure, responsable à Berlin du Bureau des arts plastiques – qui dépend de l’ambassade de France –, les chiffre à une bonne soixantaine. Certes la majorité, fraîche émoulue des écoles de beaux-arts, n’est pas mûre pour conquérir les grandes galeries. Le déclic n’est pas pour autant immédiat pour la génération des trentenaires ou des quadras. On relit du coup avec une certaine ironie les propos benoîts du marchand berlinois Matthias Arndt dans la revue Topographies publiée en décembre 2002 par l’Association française d’action artistique (AFAA) : « La situation actuelle de l’art contemporain en France présente une forte dynamique. » Or, Arndt & Partner ne compte désormais qu’une artiste française, Sophie Calle, après s’être récemment séparé de Claude Lévêque, dont il ne parvenait pas à vendre les pièces…

Hormis les Berlinois Carlier-Gebauer, Esther Schipper et Mehdi Chouakri ou la Munichoise Traversée, les galeries allemandes sont rarement curieuses de notre scène. Par la force des choses, la plus francophile des enseignes berlinoises, la toute jeune « Galerie 5213 », est dirigée par le Français Caryl Ivrisse !

Les puissantes galeries allemandes
Si quatre galeries, notamment Barbara Weiss avec Niele Toroni et Play Gallery avec Pierre Coulibeuf, figurent au programme d’Art France Berlin, d’autres ont refusé tout sceau tricolore. C’est le cas d’Esther Schipper, qui expose Philippe Parreno jusqu’au 4 novembre, ou de Giti Nourbakhsch, laquelle présente Vincent Tavenne jusqu’au 28 octobre.

Faute d’obtenir l’oreille des grandes galeries, réfractaires à toute manœuvre diplomatico-politique, la France s’échine à inscrire ses artistes dans le tissu allemand via des projets dans les musées. L’oiseau fait son nid, mais ne compense pas la faiblesse du volet commercial. Un palier pourtant fondamental. « Le marché de l’art joue en Allemagne un rôle essentiel dans la reconnaissance internationale des artistes, reconnaissait le numéro de Topographies précité. Un artiste ne peut accéder à la notoriété s’il n’est pas soutenu par l’une des nombreuses et puissantes galeries allemandes, qui jouent un rôle capital sur le marché international. »

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°243 du 22 septembre 2006, avec le titre suivant : L’art français s’installe à Berlin

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