Johann König, galeriste à Berlin : « La ville s’embourgeoise »

Johann König a ouvert sa galerie à Berlin en 2002, à l’âge de 21 ans, avant même d’avoir passé le bac. Il inaugurera un nouvel espace en 2014 dans une ancienne église d’architecture brutaliste, Sainte-Agnès, avec l’artiste Tatiana Trouvé. La galerie Johann König a réalisé l’an passé 7,65 % de son chiffre d’affaires avec des collectionneurs français.

Vous allez ouvrir courant 2014 un nouvel espace d’exposition dans une ancienne église. Pourquoi avoir choisi un espace atypique ?
Le bâtiment n’est pas si atypique, il ressemble plus à un bâtiment de musée ou de Kunsthalle qu’à une église. C’est un bâtiment d’architecture moderne de l’après-guerre, il s’agit d’une architecture conceptuelle.

Lors du Gallery Weekend (organisé du 26 au 28 avril 2013), l’artiste Alicja Kwade a majestueusement rempli cet immense espace à l’aide d’une simple ampoule électrique animée du mouvement du pendule de Foucault (« Nach Osten »). Comment allez-vous réorganiser l’espace par la suite ?
L’église va être radicalement transformée. Un niveau d’exposition va être ajouté, cela ressemblera à une Kunsthalle. Il y aura quatre grandes expositions par an, auxquelles s’ajouteront dans les salles plus petites des expositions mensuelles. Cela se fera sans hiérarchie entre artistes établis et artistes émergents. Nous ouvrirons au printemps prochain avec l’artiste Tatiana Trouvé.

La tendance à Berlin est aux galeries-appartements, à un retour à l’intimité. Votre projet est complètement différent. N’est-ce pas un risque ?
Évidemment, c’est un énorme risque. Mais c’est aussi beaucoup plus intéressant. Le concept de galeries-appartements ne me plaît pas. Berlin s’embourgeoise de plus en plus. Et il manque ici toujours des espaces pour exposer l’art. La situation s’est certes améliorée, mais on ne peut pas renoncer aux grands espaces des galeries. Par ailleurs, en raison de la montée des prix de l’immobilier, être propriétaire des locaux de sa galerie constitue une certaine sécurité qui compense la prise de risque.

On entend souvent dire qu’il n’y a pas assez de collectionneurs à Berlin. Le confirmez-vous ?
Nous réalisons 5,75 % de notre chiffre d’affaires avec les collectionneurs de la région. C’est vrai qu’il y a peu de collectionneurs à Berlin, mais la situation est compensée par de nombreux autres avantages : la présence des artistes, les loyers modérés, la vie quotidienne bon marché. Ceux-ci sont justement une conséquence de l’absence de pouvoir financier.

Une nouvelle génération de collectionneurs n’est-elle pas en train d’émerger ?

Il y a effectivement une nouvelle génération de collectionneurs provenant du « nouveau Berlin », de l’économie Internet, de l’industrie de la mode, du monde de la musique… Il s’agit plutôt de gens créatifs, qui commencent à collectionner. Berlin est une ville extrêmement créative. Les gens qui gagnent de l’argent le font certes grâce à des activités commerciales, mais surtout grâce à la partie créative de ces activités commerciales.

Propos recueillis et traduits de l’allemand par Isabelle Spicer.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°393 du 7 juin 2013, avec le titre suivant : Johann König, galeriste à Berlin : « La ville s’embourgeoise »

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