L’artiste dévoile pour la première fois ses tableaux et poursuit sa quête de l’entre-deux.
Paris. S’il fallait définir le centre du travail de David Douard, il se situerait sans doute dans l’espace de l’interstice. De façon paradoxale puisqu’il s’agit généralement d’un endroit vide, de vacance, éventuellement de transition où il ne se passe pas grand-chose. Or c’est précisément le contraire dans les œuvres de l’artiste (né en 1983) puisque c’est précisément là que tout se joue comme en témoignent ses tableaux (c’est la première fois qu’il en expose) aux allures de boîtes plates composées d’un fond surmonté d’une plaque de plexiglas. Cela crée un arrière-plan peint de face et un premier derrière la plaque transparente, laissant entre eux un intervalle où leurs formes et couleurs se juxtaposent, dialoguent et génèrent l’image abstraite finale, évoluant selon notre déplacement.
Mais c’est surtout dans les sculptures de David Douard que l’interstice est encore plus essentiel. Peut-être parce qu’il est moins visible au premier coup d’œil et sans doute parce qu’il apparaît vite comme l’élément structurant de toute la composition, lui donnant à la fois son assise et son équilibre fragile. Ces sculptures sont en effet composées de matériaux très variés, la plupart récupérés, certains bruts, d’autres retravaillés voire complètement refaçonnés, qui donnent aux œuvres leur forme, leur savante esthétique, leur symbolique. « Je tiens à ce qu’ils n’aient pas de valeur, qu’ils soient le résultat d’une appropriation de la rue », dit Douard en se référant à l’errance urbaine caractéristique du film Permanent Vacation (1980) de Jim Jarmusch qu’il adore.
Dans un premier temps se manifeste le besoin spontané d’identifier ces matériaux. Ici des barres de métal, des pommeaux de douche, des bassines pour bébé, ailleurs des boules miroirs pour nous intégrer dans l’œuvre, et s’enchaînent comme des phrases, de façon logique pour l’artiste passionné de mots, de lettres, de lettrisme. Vient alors l’envie de comprendre comment ils peuvent se conjuguer les uns les autres tant leur disparité de formes, de couleurs, de matières est grande. Et c’est là que surgit à nouveau cette notion d’interstice qui permet de relier tous ces éléments de façon à la fois intuitive et rigoureuse. Comme si l’intervalle entre eux devenait un liant, un ciment permettant l’harmonie de ces associations a priori impossibles mais qui au final sont justement magnifiées par cette alchimie entre les vides, les pleins, les courbes, les droites, le lisse et l’hérissé. Résultat à la fois d’intuition, de rigueur, de chaos maîtrisé, ces totems s’érigent alors – quelquefois sur roulettes – comme un splendide concentré d’énergie révélant une très dense intériorité.
Entre 8 500 euros pour de petits collages et 50 000 pour les plus grosses sculptures, les prix sont très raisonnables pour un artiste dont la cote est stable, bien contrôlée et qui a toujours su gérer sa déjà belle carrière sans jamais tomber dans la mode.
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David Douard, l’interstice en capitale
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°656 du 23 mai 2025, avec le titre suivant : David Douard, l’interstice en capitale





