Ventes aux enchères

Bill Pallot vend sa collection aux enchères

Par Marie Potard · lejournaldesarts.fr

Le 18 juin 2021 - 743 mots

PARIS

L’expert qui attend toujours son procès pour faux, disperse une partie de sa collection chez AuctionArt.

Bill Pallot. © Photo Karl Lagerfield, 2013, CC BY-SA 4.0
Bill Pallot.

Bill Pallot se sépare d’une partie de sa collection… en attendant son procès. L’expert en mobilier et objets d’art anciens avait fait couler beaucoup d’encre en se retrouvant au cœur d’une vaste enquête pour trafic de faux en 2016, reconnaissant avoir fait fabriquer de faux sièges, dont certains ont été vendus au château de Versailles. 

Alors que l’audience devant le Tribunal de Pontoise n’est toujours pas fixée - « la procédure est toujours en cours », indique son avocate Claire Doubliez au Journal des Arts - il a décidé de vendre aux enchères une partie de sa collection d’objets d’art qui garnissaient son appartement à deux pas des Champs-Élysées. « Je vends la moitié de ma collection pour en constituer une nouvelle. J’ai déjà commencé d’ailleurs, depuis pratiquement un an, mais les nouveaux objets, encore des objets de curiosité, sont dans un dépôt car je n’avais plus de place chez moi. Cela fait 25 ans que j’achète et j’ai envie de continuer », raconte Bill Pallot.

Pour disperser les 937 lots, trois vacations orchestrées par AuctionArt - Rémy Le Fur, vont être nécessaires, du 6 au 8 juillet. Les catalogues de vente ne mentionnent pas le nom du collectionneur et indiquent seulement en titre « La Collection : 25 ans d’éclectisme ». 

Parmi les lots, dont les estimations sont plutôt basses, figurent une Bibliothèque éclairante en placage de bois de palmier, vers 1930, d’Eugène Printz (est. 40 000 à 60 000 €) ; des Memento Mori, des écorchés, de nombreux crânes, des masques africains et océaniens, des coupes en émail, des photos de Pierre Molinier (800 à 1 000 €), des masques du Japon, des crucifix, des céramiques chinoises, une armure japonaise de l’époque Edo, XVIIe-XVIIIe (20 000 à 25 000 €), des crânes de crocodiles, des microscopes, des dents de narval (6 000 à 8 000 €)… Un véritable cabinet de curiosités.

Historien d’art, directeur du département mobilier à la galerie Aaron pendant 30 ans, chargé de cours à l'université Paris IV Paris-Sorbonne, Bill Pallot était surnommé le « Père la Chaise », en raison de ses connaissances en sièges XVIIIe ; il est l’auteur d’un ouvrage de référence en la matière, « L’Art du siège au XVIIIe siècle ». L’expert en costume trois pièces bénéficiait d’une solide réputation que personne ne contestait. 

Tout a basculé le 7 juin 2016, lorsqu’il est placé en garde à vue dans le cadre d'une enquête conduite par l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC) sur un trafic de faux sièges du XVIIIe siècle. Le 9 juin, il est mis en examen pour « escroquerie en bande organisée » et suspicion de blanchiment, par une juge de Pontoise, après avoir avoué fait fabriquer par « amour du jeu  » deux copies d'une chaise du pavillon du Belvédère (Petit Trianon) issue d’un ensemble commandé par Marie-Antoinette vers 1780 à François II Foliot. Classées Trésor national en 2013, le château de Versailles ne les avait finalement pas acquises - elles avaient été vendues par la suite pour 2 millions d'euros au cheikh Al Thani par la galerie Kraemer, qui, depuis, les a remboursées. 

A l’été 2016, une mission d’inspection gouvernementale était ouverte concernant, outre les copies du Belvédère, plusieurs sièges acquis par Versailles ou ayant un jour transité par le château, comme deux ployants de François I Foliot, ou une bergère de Madame Élisabeth.

Placé en détention provisoire le 10 juin 2016, Bill Pallot en ressortait le 8 octobre, après 4 mois passés à la prison d’Osny. Depuis, il poursuit sa route : « à ma sortie, il y a presque 5 ans maintenant, je pensais qu’il fallait que je fasse autre chose mais beaucoup de gens m’ont convaincu du contraire ». Il retourne alors à Drouot. « J’ai revu d’anciens clients, puis je me suis fait une nouvelle clientèle - tout à fait au courant de mes ennuis judiciaires. Je fais beaucoup d’inventaires de succession et de partage, du conseil, je travaille avec des décorateurs, je fais de la recherche historique. Pour l’instant, je touche du bois, ça se passe bien. Je ne minimise pas ce que j’ai fait mais c’est vrai qu’en 5 ans, personne ne m’a vraiment rejeté ou insulté ».

Où en est la procédure judiciaire ? « Mon procès, je ne sais pas quand est-ce qu’il aura lieu. En cinq ans, je n’ai vu la juge d’instruction que deux fois. La dernière fois, elle m’a dit : je suis débordée. Si les sièges n’avaient pas terminé à Versailles, je ne m’en occuperai même pas ! ».
 

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