Foire & Salon

Bologne

Arte Fiera fête ses 30 ans

Et confirme le pli international adopté l’an dernier

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 20 janvier 2006 - 738 mots

BOLOGNE - Qui pense foire italienne d’art contemporain pense Artissima à Turin. Par un curieux paradoxe, si la foire la plus à la pointe s’est installée dans la capitale du Piémont, une ville d’affaires, c’est à Bologne, ville intellectuelle et progressiste, que se tient depuis trente ans le salon le plus traditionnel d’Italie, Arte Fiera. Traditionnel, lucratif, et gentiment ronronnant, pourrait-on même dire. Le volontarisme de Luca di Montezemolo, collectionneur et patron de Ferrari, n’est pas étranger au réveil récent de cette manifestation. Celle-ci est devenue un chaînon dans l’essor du Parc des expositions de Bologne, dont Montezemolo est le président. Une étape aussi pour la création future d’un festival d’art à Bologne. Pour parfaire ces nouvelles ambitions, les organisateurs avaient missionné en 2003 l’ancien patron d’Art Basel, Lorenzo Rudolf, au chevet de la foire. Le sursaut qualitatif n’a pas tardé à se manifester avec l’arrivée l’an dernier de nouveaux exposants comme Thaddaeus Ropac (Paris, Salzbourg), Karsten Greve (Cologne, Paris, Saint-Moritz), Jérôme de Noirmont (Paris) ou Lisson (Londres). Ces recrues persistent et signent tout en ralliant cette année Arndt & Partner (Berlin, Zurich), Claude Bernard (Paris) et Sollertis (Toulouse). Cette petite lucarne sur l’international n’entame en rien l’identité d’Arte Fiera, à 73 % transalpine. « Arte Fiera doit rester une foire italienne, car il y a aujourd’hui une attention particulière sur l’art contemporain dans notre pays », insiste Silvia Evangelisti, directrice de la foire.
Pour rompre la routine dans laquelle elle s’était installée, Arte Fiera joue sur la fibre de la nouveauté. Une idée qu’elle prend au pied de la lettre en invitant dix jeunes galeries dans une section baptisée « Esprit nouveau ». Aussi, sous l’intitulé « Art First », elle sème dix projets d’artistes dans plusieurs musées en centre-ville. C’est au critique d’art Achille Bonito Oliva que l’on doit l’initiative la plus farfelue, baptisée sous forme d’oxymore « Arte : dimenticare a memoria » [Oublier par cœur]. Ce dernier convie six artistes (1) à parler pendant trois jours d’œuvres qu’ils auraient aimé réaliser. Au terme de ces journées, Bonito Oliva mettra ce « concept » en ventes publiques sur la foire. Avec l’argent récolté, il achètera des œuvres de jeunes artistes pour les offrir aux musées de Bergame, Bologne, Rome, Naples et Nuoro, en Sardaigne. Réussira-t-il à rivaliser avec le fonds d’acquisition pour la Tate sur Frieze Art Fair à Londres (150 000 livres sterling, 218 720 euros) ou celui de la Fondation ARCO à Madrid (174 000 euros) ? À voir.

20 % de remise d’office
Plus novatrice, Arte Fiera ne joue pas pour autant dans la même cour qu’Artissima. « Bologne est plus grande, plus tolérante dans sa sélection. Les champs esthétiques sont plus larges que sur Artissima, où ils sont resserrés et identifiables, remarque la galeriste Magda Danysz (Paris). Turin n’est pas connue pour son succès commercial, mais pour sa qualité. Les Italiens vont à Artissima comme au musée, mais à Bologne pour acheter. » Acheter et marchander. « Les Italiens négocient beaucoup, demandent 20 % de réduction d’office, admet Youri Vincy, codirecteur de la galerie Lara Vincy (Paris). Mais il y a une vraie dynamique. L’an dernier, nous avions vendu trente à quarante œuvres, alors qu’à la FIAC, à Paris, cela a été une dizaine de pièces à tout casser. » Pourquoi le commerce y est-il aussi actif ? « Bologne a une section moderne. Il y a un pont naturel entre les jeunes collectionneurs et ceux plus traditionnels qui achètent des Fontana », observe Pilar Corrias, directrice de Haunch of Venison (Londres, Zurich). Si les Italiens sont acheteurs, encore faut-il répondre à leur demande. Le tropisme latin conduit la galerie Di Meo (Paris) à valoriser ses classiques de l’école romaine ou sa consœur Continua (San Gimignano) à privilégier ses jeunes poulains transalpins. Les ventes importantes invoquées par les vétérans de la foire appellent aussi des œuvres relativement « domestiques ». La galerie Massimo Minini (Brescia) affiche plus d’installations volumineuses sur Artissima, fréquentée par les directeurs de musées, qu’à Bologne. En novembre dernier, il était possible de voir sur son stand à Turin une très grande sculpture en granit noir d’Anish Kapoor. À Bologne, il faudra se contenter d’un plus petit spécimen en acier de l’artiste britannique.

(1) Enzo Cucchi, Braco Dimitrijevic, Liliana Moro, Michelangelo Pistoletto,
Ettore Spalletti et Sisley Xhafa.

Arte Fiera

27-30 janvier, Bologna Exhibition Centre, halls 16-18-21-22, Bologne, www.artefiera.bolognafiere.it, du 27 au 29 janvier 11h-19h, le 30 janvier 11h-17h.

Arte Fiera

- Directrice : Silvia Evangelisti - Nombre d’exposants : 256 - Tarif des stands : 178 euros/m2 - Nombre de visiteurs en 2004 : 40 000

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°229 du 20 janvier 2006, avec le titre suivant : Arte Fiera fête ses 30 ans

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