Les prêts du British Museum à Abou Dhabi font débat

Par Julie Paulais · lejournaldesarts.fr

Le 8 juin 2015 - 574 mots

LONDRES (ROYAUME-UNI) [08.06.15] – En début d’année, le British Museum avait révélé un accord passé avec le Zayed National Museum pour le prêt de plusieurs centaines d’œuvres issues de ses réserves. The Art Newspaper révèle que parmi les 500 objets, le musée enverra aussi des pièces phares, comme le relief du Banquet d’Assurbanipal. Ce qui n’est pas sans susciter des critiques outre-manche.

Le British Museum va prêter 500 objets au Zayed National Museum d’Abou Dhabi, qui doit ouvrir ses portes en 2016, pour une durée de cinq ans à partir de 2017. The Art Newspaper révèle la liste probable de ces objets, parmi lesquels se trouveront des objets phares des collections, qui doit être validée définitivement par le conseil d’administration. Le British Museum recevra une redevance substantielle pour ce prêt, mais a refusé d’en révéler le montant.

Le contrat initial datant de 2009 avec le futur musée d’Abou Dhabi, prévoyait de prêter des objets issus de ses réserves, excluant les œuvres exposées dans les collections permanentes. Mais les prêts incluent dorénavant des œuvres majeures, parmi les 5 000 œuvres phares du musée, notamment sept reliefs assyriens, similaires à ceux détruits par l’Etat Islamique à Nimrud en Avril, dont le Banquet d’Assurbanipal (645-635 av. J.-C.) et un génie ailé à tête de rapace (875-860 av. J.-C.), ainsi que la statue du roi Ashurnasirpal II (883-859 av. J.-C.), un exemple unique de statue assyrienne complète en ronde-bosse. Ces prêts ont déjà laissé de larges espaces vides dans les galeries assyriennes du British Museum. Les reliefs ont déjà été enlevés et placés dans une réserve temporaire, ce qui les rendra invisibles deux années supplémentaires.

Les autres pièces qui seront envoyées à Abou Dhabi comprennent des tablettes cunéiformes, des objets en or sassanides, des bijoux phéniciens, romains et grecs, des portraits du Fayoum, des antiquités de l’Indus, des objets byzantins, de la porcelaine Ming, des miniatures mogholes, des rouleaux japonais et de l’art décoratif européen. Dans cette liste, sept objets ont été acquis avec de l’argent provenant de l’Art Fund, et le British Museum aura besoin de l’accord de cet organisme avant de prêter ceux-ci pour une aussi longue durée à plus de 5 500 km du Royaume-Uni.

Des réserves importantes entourent ce prêt massif d’œuvres majeures pour le British Museum et l’humanité toute entière. The Art Newspaper rappelle ainsi les destructions récentes d’antiquités préislamiques par Daesh à Nimrud, Ninive, Hatra, et l’attaque terroriste du Musée du Bardo à Tunis, menée par des alliés de l’EI, et posent la question de l’opportunité de les prêter aussi longtemps. Par ailleurs, beaucoup des prêts auront un impact sur le réaménagement annoncé en mars des galeries d’art islamique, prévues pour ouvrir en 2018.

The Independant rapporte quant à lui les préoccupations des associations de défense des droits de l’homme, qui dénoncent farouchement les conditions de travail des ouvriers sur les chantiers d’Abou Dhabi, notamment le Zayed National Museum. Certaines exhortent le British Museum à repenser son prêt. « Les musées de Saadiyat Island sont tous construits sur un système d’esclavage moderne », a déclaré Sharan Burrow, secrétaire générale de l’International Trade Union Confederation.

Une porte-parole du British Museum a répondu que le musée travaillait avec la Compagnie de Développement Touristique et d’Investissement (TDIC) d’Abou Dhabi, qui supervise la construction du Zayed Museum et s’assure que les travailleurs soient traités correctement, et que des membres de l’équipe du musée et du conseil d’administration se sont déjà rendus sur place pour visiter le site.

Légendes photos

Le British Museum © Photo Ham - 2013 - Licence CC BY-SA 3.0

The Banquet Scene relief néo-assyrien qui va être donné à Abu Dhabi, provenant d'Irak © Photo British museum - 645 BC-635 BC © The Trustees of the British Museum

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque