Dossier Fiscalité du marché de l'art

États-Unis

Le Journal des Arts

Le 28 mars 2012 - 1116 mots

Si les donations sont une pratique courante aux États-Unis, elles doivent respecter des règles très précises.

La donation d’une œuvre d’art à une institution publique (une charity) peut réduire l’impôt sur le revenu du donateur. Ainsi, un tableau acquis 1 000 dollars, il y a quelques années peut avoir une valeur de 10 000 dollars sur le marché aujourd’hui. Donner ce tableau à une institution publique (pas une fondation privée) qui respecte la loi fiscale correspondante, entraîne une déduction de la base imposable de 10 000 dollars. Pour quelqu’un qui est dans la tranche d’imposition de 35 %, une telle donation permet d’économiser 3 500 dollars en impôt sur le revenu. Alors que le donateur n’avait déboursé que 1 000 dollars, le contribuable a économisé 3 500 dollars d’impôts et a pu jouir pendant plusieurs années de l’œuvre.

En général, une déduction est permise à la valeur du marché de l’œuvre d’art donnée à une charity si les quatre critères suivants sont respectés :
- l’objet d’art doit être donné à une organisation publique, pas à une fondation privée ;
- l’objet d’art doit être un bien meuble de type « plus-value à long terme » et non pas de type « court terme ». Cela signifie que le bien cédé doit être possédé depuis plus d’un an ;
- l’objet d’art doit correspondre à la mission du bénéficiaire, c’est-à-dire que l’usage qu’en fait le bénéficiaire de la donation doit répondre au type d’exemption de taxes en relation avec la mission de l’institution ;
- l’objet d’art doit être estimé par un expert certifié.

La valeur du don est sujette à une limite globale de 30 %, c’est-à-dire que la déduction pour une année fiscale ne peut excéder 30 % de la base d’imposition du donateur. Au-delà des 30 %, cette valeur du don peut être reportée et déduite pendant cinq ans. Une institution caritative est en général financée par des fonds publics.

Par exemple, si un contribuable a une base d’imposition de 100 000 dollars, la déduction maximale pour la donation d’une œuvre d’art est de 30 000 dollars. Si l’œuvre d’art a une valeur de 50 000 dollars, les 20 000 dollars restants peuvent être déduits l’année suivante. Si au lieu de donner l’œuvre, le contribuable la vend, la taxe fédérale sur les plus-values à long terme est de 28 %, au lieu de 15 % pour les plus-values sur la vente d’actions, d’obligations ou d’immobilier.

Règle relative au type d’utilisation de l’objet d’art
Cette règle s’applique aux plus-values sur les biens qui sont des biens meubles donnés à une institution publique. Le terme « bien meuble » désigne des tableaux et objets d’art non fabriqués par le donateur. La réglementation exige que l’usage de ce bien meuble par le bénéficiaire soit en relation avec la mission du bénéficiaire, déterminant le type d’exemption fiscale selon la section 501 du code fiscal. Si l’utilisation par le bénéficiaire n’est pas en relation avec sa mission, la déduction pour don doit être réduite de 100 % par rapport à sa valeur estimée. En l’espèce, après la réduction de 100 %, le solde peut-être déduit jusqu’à 50 % de la valeur de la donation.

Si un objet d’art est donné pour une vente aux enchères organisée par l’institution publique, c’est une utilisation inappropriée avec la mission de l’institution, aussi 100 % de sa valeur est perdue pour la déduction.

Une évaluation qualifiée
L’administration a ainsi défini ce qu’est une évaluation qualifiée : selon les règles définies par l’Internal Revenue Service (IRS) et réalisée par un évaluateur certifié conforme aux prescriptions de l’IRS.

Les règles actuelles de l’Internal Regulation Code (IRC) stipulent que l’évaluation doit être réalisée soixante jours avant la date de la donation et qu’elle doit être signée et datée par un expert agréé dont la rémunération n’est pas proportionnelle à la valeur de l’évaluation. Le document d’évaluation doit indiquer les mentions suivantes : une description détaillée du bien, l’état physique du bien, la date ou date prévue de la donation, l’usage qui sera fait de la donation, nom, adresse, numéro fiscal de l’expert, un curriculum vitae détaillé de l’expert, l’indication que l’évaluation est destinée à une déclaration fiscale, la date de l’évaluation, la valeur « marché » du bien, la méthode d’évaluation, la base de comparaison de l’évaluation, une description des modalités de la rémunération de l’expert. ’évaluation certifiée doit être communiquée au donateur avant la date d’envoi du formulaire fiscal. Cette échéance est importante dans la mesure où la déduction est annulée si le contribuable ne la respecte pas.

L’évaluateur certifié
L’administration fiscale a défini dans l’IRC ce qu’est un évaluateur certifié qui doit être agréé par un organisme d’experts reconnu ou disposer d’un niveau minimum de formation et d’expérience, réaliser régulièrement des évaluations rémunérées, se conformer à d’autres règles fixées par l’IRS.
Un particulier ne peut pas être qualifié d’évaluateur certifié, à moins qu’il ne prouve sa formation et son expérience dans l’évaluation de ce type de bien et qu’il n’a pas été interdit de pratique d’expertise durant les trois années qui précèdent l’évaluation.

Legs d’objet d’art
Au décès, il y a une déduction de 100 % pour tout ce qui est cédé à une institution publique. La valeur totale des biens cédés est soustraite de la succession, comme s’ils n’existaient pas. Aucune taxe n’est appliquée. C’est la raison pour laquelle de nombreux collectionneurs lèguent aux musées leurs plus belles pièces au moment de leur décès pour éviter les droits de succession de 35 %.

Donations fractionnées d’œuvres d’art
Depuis 2006, il n’est plus recommandé de donner de manière fractionnée. Si un collectionneur donne 10 % d’un tableau à un musée, le musée doit posséder physiquement le tableau 10 % de l’année, et le donateur peut alors revendiquer une déduction de 10 % de la valeur du tableau. Cependant, si la valeur du tableau augmente et si le donateur donne une nouvelle part par la suite, la déduction est basée sur la valeur originale. Il n’y a plus de bénéfice associé à l’augmentation de valeur du bien. De surcroît, la donation totale doit être achevée dans les dix ans.

Plus-values
Objets de collection, objets d’art, sculptures, estampes, antiquités.. possédés depuis plus d’un an, sont des actifs taxés par l’IRS à 28 %, contrairement aux actions, obligations et biens immobiliers taxés à seulement 15 %. Si les objets d’art sont possédés depuis moins d’un an, le taux est de 35 %. C’est une motivation supplémentaire pour les collectionneurs afin qu’ils donnent plutôt que vendre des objets d’arts et ainsi payer 28 % de taxes. Si l’État taxe les revenus, le montant total des taxes sur les plus-values peut atteindre 40 %.

Ralph Lerner
(Avocat, Withers Bergman LLP)
Pierre Valentin
(Avocat, Withers LLP)
www.withersworldwide.com
 

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°366 du 30 mars 2012, avec le titre suivant : États-Unis

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