Warhol - Basquiat - Clemente = l’équation « eighties »

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 18 mai 2011 - 343 mots

À faire saliver le marché. En 1984, Jean-Michel Basquiat, Francesco Clemente et Andy Warhol s’associent pour une quinzaine de toiles explosives, à l’image d’Origin of Cotton, grand format sur lequel s’agglutinent des visages à la Clemente, masques sans corps aux yeux tragiquement arrondis, tandis que de violentes inscriptions trouent de blanc une superposition d’images sérigraphiées par Warhol. Les quatorze autres œuvres joueront une partition similaire, mixant emprunts publicitaires, griffures et coulures, corps tordus et combinaisons de signes et de symboles. 
Signe des temps – on est au début des années 1980 –, c’est au galeriste suisse Bruno Bischofberger que revient d’initier la collaboration de ses trois protégés, voire d’en fixer les règles jusqu’aux moindres détails. Warhol, avec qui il travaille depuis les années 1960, règne en maître dans l’effervescence de sa Factory, mais semble ramollir côté créatif, Clemente est sur le point d’exploser et Basquiat ne demande qu’à être promu. Quoi de plus excitant que de fédérer les trois héros? 

Un accueil public en demi-teinte 
Bischofberger présente le jeune Basquiat à Warhol en 1982. Ils se plaisent, se photographient, se peignent et acceptent la commande du marchand. Après une hésitation en faveur de Julian Schnabel, c’est Clemente, lié au Zurichois, déjà proche de Warhol et voisin d’atelier de Basquiat, qui finit par rejoindre le duo.Le protocole est simple : chacun démarre dans son coin quelques toiles à l’huile ou à l’acrylique, sans se soucier des projets des deux autres. Et fait tourner. Résultat : masques tragiques vigoureusement colorés pour Clemente, impressions sérigraphiques – répétant bien souvent les motifs de ses complices – pour Warhol, à l’exception de quelques fulgurances peintes à la main, et juxtaposition brutale de slogans et dessins pour Basquiat.
Le 15 septembre 1984, la collaboration s’affiche sur les murs de la galerie à Zurich et fait évidemment événement. Basquiat et Warhol prolongeront encore leur complicité d’une année, mais sans cette fois le succès escompté. L’accueil tiède de la critique, soupçonnant l’aîné de se nourrir du sang du cadet, aura finalement raison d’une brève séquence collaborative aujourd’hui guettée par les collectionneurs.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°636 du 1 juin 2011, avec le titre suivant : Warhol - Basquiat - Clemente = l’équation « eighties »

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