In situ

Visions surnaturelles

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 22 juin 2016 - 412 mots

Mark Dion convoque énigme et surnaturel dans un accrochage immersif aux Beaux-arts de Paris.

PARIS - Pour qui aime à se perdre dans des méandres ou arpenter des dédales habités de curiosités frôlant le paranormal, c’est aux Beaux-arts de Paris qu’il convient de se rendre. Invité par l’institution, Mark Dion s’est plongé dans les riches collections des lieux afin d’en tirer un parcours qui agrège des travaux anciens (140 environ, mêlant Dürer et Goya à d’illustres inconnus ou des petits maîtres oubliés) à ceux d’une douzaine de plasticiens contemporains – lui-y compris – qui laissent apparaître souvent un intérêt pour l’énigme à l’approche des territoires surnaturels. Dans la dernière salle, une corne de licorne de James Lee Byars est magnifiquement dressée sur un socle de marbre blanc, qui voisine avec un énigmatique triangle doré d’Olivier Mosset et des jeux de tarots de Marseille du XVIIIe siècle.

Des trésors exhumés
S’il est réussi dans la forme et dans le fond, l’exercice impose sa propre limite dans une sorte de systématisation. Dion a par le passé prouvé, et en de nombreux endroits, sa sagacité et sa dextérité à aller explorer les réserves de musées afin d’en faire ressortir des trésors cachés, mais aussi à mettre en lumière les codifications, classifications et typologies, tout comme les modes de lecture et de présentation inhérents à différentes époques et disciplines. Ce qui conduit ici à ne plus succomber à aucun effet de surprise devant le dispositif mis en place, empli de vitrines et de curiosités, tant est forte la sensation de déjà-vu. Au-delà de cette réserve formelle, l’intérêt du projet réside dans le fait que l’artiste s’est éloigné du domaine des sciences et de la nature qui lui est cher afin d’aller explorer ces contrées plus surnaturelles, « extra-naturelles » dit le titre de l’exposition, en remettant en lumière un bon nombre de trésors, inconnus et inattendus.

Scindé en quatre sections avant la salle finale, le parcours se place sous le signe des quatre éléments à chacun duquel est dévolu un espace toujours remarquablement mis en scène, entre papier peint, vitrines et lumière crépusculaire. À travers des objets, gravures, ouvrages anciens, sculptures… c’est un monde invisible qui se dévoile, où partout il est question de créatures hybrides, d’étrangeté, de monstres, démons, satyres et sorcières. Enfin, c’est aussi une bonne idée d’avoir présenté dans une vitrine les petits travaux de récents diplômés, manière d’insister sur le fait que l’ailleurs ne cesse de questionner les artistes, même les plus jeunes.

MARK DION. EXTRA NATUREL, VOYAGE INITIATIQUE DANS LA COLLECTION DES BEAUX-ARTS DE PARIS

jusqu’au 14 juillet, Palais des Beaux-arts, 13, quai Malaquais, 75006 Paris, tél. 01 47 03 50 00, www.beauxartsparis.fr, tlj sauf lundi 13h-19h, entrée 7,50 €. Catalogue à paraître.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°460 du 24 juin 2016, avec le titre suivant : Visions surnaturelles

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