Musée Picasso

Vingt ans après

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 21 octobre 2005 - 544 mots

Le Musée fête son vingtième anniversaire avec une vaste exposition sur le travail de dessinateur du maître espagnol.

 PARIS - À l’époque où il portait encore des culottes courtes, Picasso brillait déjà par l’assurance de son trait. Un talent de dessinateur à la limite du toupet pour quelqu’un de si jeune. Le Musée Picasso, à Paris, propose, pour fêter son vingtième anniversaire, de revenir sur le génie créatif de l’artiste, au travers de l’exposition « Picasso. La passion du dessin ».
À 13 ans à peine, Pablo compile La Coruña, son propre journal. Il y croque divers personnages, ose la caricature et se fend de commentaires explicatifs. Ce souci de narration le quittera bien vite. Le parcours de l’exposition, strictement chronologique, est divisé par périodes et offre de redécouvrir l’art de Pablo à tous les stades de sa vie. Jean Clair, ancien directeur du Musée Picasso – il a pris sa retraite le 20 octobre –, mais aussi commissaire de l’exposition « Mélancolie » au Grand Palais (lire p. 18), a sans doute tergiversé devant Le Père de l’artiste, petite aquarelle de 1896. Accoudé à une table, le visage au creux de la main, José Ruiz Blasco prend la pose classique du typus melancholicus.
Lorsque le peintre erre dans les cafés et cabarets du Paris de la Belle Époque, il s’adonne à la caricature hilarante d’une soirée de vernissage, évoque un sanglant coupeur de têtes et l’apparition chimérique d’un Pierrot. Très vite, l’art primitif le contamine. Les études pour L’Amitié (1907-1908), et pour le Nu debout (1908) témoignent d’une recherche esthétique incessante, tant sur les couleurs que sur les motifs. Aux abords des grandes années du cubisme, la Tête de Fernande (1909) fait face à sa propre esquisse. Car si le dessin est roi, la sculpture et la peinture viennent étoffer le propos. Un peu à la manière de dessins lors d’expositions de peintures.
Le rouge carmin envahit les murs réservés aux gouaches des costumes et des décors du Tricorne, de Pulcinella et de Parade. La contribution théâtrale de l’artiste n’est jamais passée inaperçue ; une petite étude pour un décor inclut, dans un coin, un balcon où est assis un spectateur, les mains sur le visage, manifestement horrifié par ce qu’il peut voir.

Papier trituré
L’artiste fréquente les plus grands, en témoignent les portraits furieusement sages de ses contemporains (Max Jacob, Apollinaire, Stravinsky, Manuel de Falla, Erik Satie). Les femmes se succèdent dans sa vie, les styles aussi : classicisme sec pour Olga, rondeurs bienveillantes pour Marie-Thérèse, angularité criarde pour Dora et arabesques délicats pour Françoise. Dora, la femme qui pleure, est pourtant impassible lorsqu’elle est saisie par le Minotaure. Le papier est, en revanche, trituré par les crayons de couleurs dont toutes les teintes ont été utilisées jusqu’à épuisement. Si l’homme vacillait sans cesse entre humour enfantin et instinct de prédateur, l’artiste poursuivait son travail, fidèle à son obsession.

PICASSO. LA PASSION DU DESSIN ET AUTOUR DES « DEMOISELLES D’AVIGNON »

Jusqu’au 9 janvier 2006, Musée Picasso, hôtel Salé, 5, rue de Thorigny, 75003 Paris, tél. 01 42 71 25 21, www.musee-p icasso.fr, tlj sauf mardi 9h30-17h30. Catalogue, éd. RMN, 300 p., 200 ill. couleurs, 39 euros, ISBN 2-7118-4996-1. Cédérom, Les Carnets de Picasso, éd. RMN, coll. « Les fac-similés numériques », 19,95 euros.

LA PASSION DU DESSIN

- Commissaire de l’exposition : Dominique Dupuis-Labbé, conservateur - Nombre d’œuvres : 365 dessins, peintures, sculptures... - Nombre de salles : 12 - Scénographie : Didier Blin

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°223 du 21 octobre 2005, avec le titre suivant : Vingt ans après

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