Une vie de peintre

Hokusai au Palazzo Reale de Milan

Le Journal des Arts

Le 24 septembre 1999 - 590 mots

Pour célébrer le 150e anniversaire de la mort d’Hokusai (1760-1849), le Palazzo Reale de Milan organise l’exposition européenne la plus importante jamais consacrée au maître japonais. Près de 500 dessins, peintures et livres présentent une œuvre dont l’influence sur l’art occidental n’est plus à prouver.

MILAN (de notre correspondante). Hokusai était mort depuis une dizaine d’années quand la diffusion de son œuvre, à travers la peinture de Manet, puis des nabis ou de Van Gogh, participa aux bouleversements picturaux de la fin du XIXe siècle. Ses gravures étaient une source d’inspiration inégalée : aux nuances et aux clairs-obscurs, Hokusai opposait des aplats colorés entourés d’un cerne aux contours fluides, et aux scènes mythologiques ou historiques, il substituait des images de la vie quotidienne du petit peuple, des acteurs ou des femmes des quartiers de plaisirs. Si cette influence est traitée à Milan, elle ne constitue qu’un chapitre de l’œuvre de celui qui se nommait lui-même le “vieux fou de peinture”. Chargé du catalogue raisonné de l’artiste et organisateur de la manifestation, Gian Carlo Calza revient sur le contenu et les thèmes de l’exposition.

Qu’apporte cette exposition ?
Au-delà d’œuvres très connues, tels le Vieux tigre sautant dans la neige qui conclut le parcours ou l’Autoportrait à l’âge de 83 ans, l’exposition regroupe des pièces inédites, comme le Singe savant réalisé peu de temps avant la mort d’Hokusai, ainsi qu’une œuvre du Musée Chiossone de Gênes. Exposée pour la première fois, elle représente une femme en train d’accoucher. Le petit Coq du Metropolitan Museum de New York est également remarquable.

Comment s’organise le parcours de l’exposition ?
Nous avons opté pour un découpage chronologique, en divisant le parcours en six sections qui correspondent aux différents noms et périodes d’Hokusai, avec une partie consacrée au Japonisme.  La première époque, la période Shunro, au cours de laquelle il exécute principalement des scènes théâtrales et des illustrations pour romans populaires, s’étend de 1779 à 1794. Le nom d’Hokusai n’est en fait utilisé qu’entre 1798 et 1810. Suivront les signatures de Taito (1810-1819) et Iitsu (1919-1834). Enfin, à partir de 1834 jusqu’à sa mort, l’artiste se fera appeler Manji et publiera notamment les trois volumes des Cent Vues du Fuji et le Traité sur l’utilisation de la couleur pour les peintres, qu’il voudra en édition bon marché “pour que tout le monde puisse en avoir un exemplaire”. Dans chaque section, peintures, livres, gravures et dessins sont mêlés. Le dessin était une pratique constante pour Hokusai. Pendant des années, alors qu’il était déjà âgé, il dessinait un lion chinois tous les matins, un porte-bonheur, un viatique pour la journée ; nous en montrons plusieurs.

L’œuvre d’Hokusai a rencontré un énorme succès en Occident. Était-il aussi apprécié en Orient ?
Au début, seulement dans les classes sociales les plus modestes : les courtisanes et les acteurs qu’il dessinait étaient les stars de l’époque. L’ukiyo-e – “images du monde flottant “–, dont Hokusai est l’un des plus importants représentants, était une forme d’art populaire très peu considérée au Japon. Il a également réalisé de superbes estampes érotiques, dont une belle sélection a été faite pour l’exposition. Par la suite son travail est entré dans les sphères intellectuelles. C’était un homme très cultivé, entretenant mille intérêts, et particulièrement critique sur sa personne. Lorsqu’il a senti sa fin approcher, il a dit : “Si le ciel m’avait accordé encore cinq ans, j’aurais pu devenir un vrai peintre !”.

Hokusai, le vieux fou de peinture

Jusqu’au 9 janvier 2000, Palazzo Reale, Piazza Duomo, Milan, tél. 39 02 62 08 38 68, tlj sauf lundi 9h30-18h30.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°89 du 24 septembre 1999, avec le titre suivant : Une vie de peintre

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