Steven Parrino

C’est du brutal”‰!

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 23 juillet 2007 - 334 mots

Familier de la scène punk new-yorkaise, Steven Parrino maltraite dans les années 1980 la peinture en général et le monochrome en particulier. Il dégrafe, plisse, étrangle, tranche ses toiles qui quittent parfois leurs châssis pour s’effondrer au sol. Plutôt que de « participer aux funérailles » d’un médium déjà mourant, Parrino dit alors se laisser « tenter par la nécrophilie ».
Ni nostalgique, ni bourreau, c’est avec la dépouille de la peinture qu’il bâtit désormais son langage. Monochromes tyrannisés ou graisseux, murs troués à coups de masse, plaques noires brillantes découpées à la tronçonneuse et guitares rugissantes, l’univers de Steven Parrino ne fait pas dans l’ouvrage de dame. Pas plus qu’il ne se décide pour un registre ou un niveau de langage. Maniant contre-culture et références savantes à l’art minimal, l’artiste opte pour une mise à plat de la culture américaine, de ses héros comme de ses marges les plus brutales : Frank Stella, les Hells Angels, Vampirella ou Warhol. Sans hiérarchie.
L’an passé, le Mamco à Genève s’était déjà doté d’une impressionnante exposition. Limpide, vivante, elle cueillait le spectateur de plein fouet pour dérouler une œuvre radicale qui n’avait de cesse de se renouveler et de se documenter elle-même. À son tour, « La Marque noire » rend hommage à cette pratique musclée du décloisonnement, transformant le Palais de Tokyo en une véritable plate-forme à l’assaut de l’artiste disparu en 2005 dans un accident de moto à l’âge de quarante-sept ans.
Modèles, héritages, performances, concerts, films, plutôt que rétrospective en forme de dithyrambe commémoratif, c’est un souffle, une énergie collective qu’a voulu esquisser Marc-Olivier Wahler. Le portrait d’une œuvre offensive qui assumerait ses effets bruts, y compris ceux de l’émotion ambiguë
provoquée par le spectacle de la destruction. À l’image d’un tout petit dessin de Parrino, placé en amorce de l’exposition genevoise : Iron Man le super-héros y atomisait littéralement le carré noir de Malevitch.

« La Marque noire. Autour de Steven Parrino »

Palais de Tokyo, 13, avenue du Président-Wilson, Paris XVIe, tél. 01 47 23 38 86, jusqu’au 26 août 2007.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°592 du 1 juin 2007, avec le titre suivant : Steven Parrino

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