A Rennes, les pionniers sont dans les prairies

Répartis en cinq lieux différents, que ce soit par des projets personnels ou par leur participation à la présentation collective, les cinquante-huit pionniers retenus s’approprient l’espace afin de le marquer d’une empreinte de conquérants et renouvellent les horizons des territoires offerts à leur créativité. Parmi les sites d’exposition, deux sont particulièrement prestigieux : la structure rouge et noire du Frac Bretagne, inaugurée en juillet, et l’ancien centre des télécommunications, connu sous le nom de New  way Mabilais. Le hasard du calendrier de sa rénovation permet d’en faire une friche industrielle propice aux recherches, aux installations et à la fabrication d’images avec d’autres images. Peintures, sculptures, vidéos, ligatures et collages occupent les salles désormais vidées de tout sauf de lumières, de couleurs, de sons et de formes inédites qui « tissent des résonances » entre les « aires » et avec l’extérieur.

Entrelacs multiples, alignement unitaire, les neuf grilles de fer désarticulées puis ressoudées de Sofia Hultén côtoient les frottages de Pierre Leguillon, élaborés à partir de couvertures de livres rendus à la mémoire, comme celle d’un ouvrage paru en 1942 opportunément appelé Lamps on the Prairie. Ailleurs, silhouette ambiguë, explosion de tonalités vibrantes, un corps androgyne peint par Miriam Cahn annonce les corps entassés de Mathieu K. Abonnenc. Une à une, les œuvres valorisent les trois ailes du bâtiment en devenir et, dans un élan de conquête de l’absence, affirment leur présence. Les Prairies invitent à une « traversée paradoxale ».