René Zuber, une vérité photographique

L'ŒIL

Le 1 mai 2003 - 429 mots

« C’était un livre de la Nouvelle Objectivité. On appelait ainsi une manière de voir le monde et les objets quotidiens de notre environnement tels qu’ils sont, dans leur émouvante nudité, comme s’ils sortaient des mains du créateur. [...] Je réalisais d’un seul coup que le monde dans lequel je vivais était beau, simplement parce qu’il était vrai. Dès lors je brûlais d’en apporter la preuve. » C’est en Allemagne, à Leipzig en 1927, que René Zuber (1902-1979), en découvrant les œuvres de László Moholy-Nagy et d’Albert Renger-Patzsch, décide de se consacrer à la photographie. Fort de ces nouvelles théories qui prônent un réalisme pur, Zuber fait de l’architecture et des objets ses deux sujets de prédilection. « Les photographes sont partis à la découverte du monde. Les pavés, les taches d’huile, les bouts de chiffons, les lézardes sur les murs et quantité d’autres choses des plus banales, que l’œil ordinaire ne remarquait pas, ont été vues pour la première fois par l’objectif photographique. De là est née l’école photographique moderne dont je fais partie. » Fasciné par l’univers de l’imprimerie, il fait de 1929 à 1931 de nombreux clichés des bacs d’encre, des cylindres et presses. Dès 1929, il travaille pour la publicité, première à imposer la nouvelle tendance de la photographie française. D’abord lié à l’agence Damour de 1929 à 1932, il fonde avec Pierre Boucher sa propre agence photo en 1933. Artiste reconnu dès 1931, Zuber expose aux côtés d’Henri Cartier-Bresson, Germaine Krull, ou Jean Moral.
Que ce soit son reportage sur la manufacture de Sèvres en 1934, ou sur le chantier de l’Exposition universelle de 1937, ou encore ses vues d’architecture, toutes ses photos s’attachent à rendre la beauté des objets industriels ou manufacturés. Sa force novatrice réside dans sa précision, son rendu des matières, son travail sur la lumière et sur les blancs, et l’absence totale de pathos dans le style de la Nouvelle Objectivité. Si dans les années 1950 il continue de travailler, sa période créative la plus intense reste relativement courte, allant de 1929 à la fin des années 1930.
Bien que ce ne soit pas rare pour les photographes de l’époque, cette brièveté Michel Bouqueret l’explique ainsi : « Comme si la course à la modernité, une certaine médiatisation fulgurante des genres l’avait épuisé en quelques années », mettant en évidence toute l’envie et le dynamisme passionné de Zuber.

CHALON-SUR-SAÔNE, musée Nicéphore Niépce, 28 quai des Messageries, tél. 03 85 48 41 98, jusqu’au 25 mai. À lire : Christian Bouqueret, René Zuber, la nouvelle objectivité, éditions Marval, 2003, 135 p.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°547 du 1 mai 2003, avec le titre suivant : René Zuber, une vérité photographique

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque