Archéologie

Quand Tarente inspirait Rome

À Daoulas, une exposition éclaire le brillant passé archéologique de l’ancienne colonie grecque

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 16 septembre 2009 - 459 mots

DAOULAS (Finistère) - Le parcours débute par un étrange objet, une pièce en os sculpté de protubérances hémisphériques provenant d’Altamura (Tarente, Musée archéologique national). Daté de la fin du troisième millénaire avant J.-C., il atteste de l’ancienneté de l’occupation de la région de Tarente (Italie).

Des pièces similaires ont été retrouvées en Anatolie, preuve que cette région du talon de la botte italienne entretenait déjà des contacts avec le Sud du Bassin méditerranéen, avant que la cité ne devienne l’une des plus puissantes colonies de la Grande Grèce. Contrairement à son image actuelle de cité industrieuse et polluée, Tarente affiche une histoire brillante comme l’illustre la savante exposition de l’abbaye de Daoulas. Celle-ci a été montée grâce à une fructueuse collaboration scientifique entre l’école française de Rome et plusieurs musées italiens, dont le très riche Musée national archéologique de Tarente, rénové récemment. Unique colonie fondée au VIIIe siècle avant J.-C. par Sparte, la ville a prospéré par sa situation de carrefour maritime entre Orient et Occident, mais aussi grâce à une solide culture guerrière qui lui a permis de résister aux assauts des populations autochtones. Aussi belliqueuses ont-elles été, ces peuplades n’étaient pourtant pas indifférentes à la culture grecque. En témoignent de nombreux objets, dont cet étonnant Cavalier d’Armento, (560-550 av. J.-C., Londres, British Museum) harnaché à la spartiate, petite ronde-bosse de bronze destinée au décor d’un vase découvert dans une sépulture indigène. Comme Syracuse (Sicile), Crotone (Calabre) ou Métaponte (Basilicate), cette colonie a ainsi été l’un des principaux centres d’hellénisation de la péninsule italienne.

Butin de guerre
C’est à l’âge classique, sous le gouvernement d’Archytas (367-361 av. J.-C.), que Tarente connaît son apogée. Ami de Platon et prosélyte de Pythagore, ce féru de calcul instaure la démocratie et soutient le développement des arts. Son retrait de la politique correspondra à l’amorce du déclin de la cité, dont la défense est confiée à des mercenaires spartiates alors que la pression romaine s’accentue. Après un premier échec en 272 av. J.-C., la ville est châtiée en 209 av. J.-C. par l’armée de Fabius Maximus pour s’être ralliée à l’ennemi carthaginois. Les chefs-d’œuvre de la ville sont saisis comme butin de guerre. L’Héraclès colossal dû au sculpteur grec Lysippe est ainsi acheminé à Rome pour être installé sur le Capitole, à côté de la statue équestre du général vainqueur. Transféré plus tard à Byzance puis fondu au XIIIe siècle, il n’est connu que par des petites copies. Mais son arrivée à Rome a contribué à transformer durablement l’art romain.

 

DE LA GRÈCE À ROME, TARENTE ET LES LUMIÈRES DE LA MÉDITERRANÉE, jusqu’au 3 janvier 2010, abbaye de Daoulas, 21, rue de l’Église, 29234 Daoulas, tél. 02 98 25 84 39, www.abbaye-daoulas.com, tlj, 10h30-18h30. Catalogue, éd. Sepia, 200 p., 37 euros, ISBN 978-2-84280-155-7.

TARENTE
Commissaire : Yann Rivière, directeur des études pour l’antiquité, école française de Rome
Scénographie : Jean-Pierre et Christian Baudu, agence Fouet’Cocher, Redon
Nombre d’objets : 335

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°309 du 18 septembre 2009, avec le titre suivant : Quand Tarente inspirait Rome

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