XIXE SIÈCLE

Peinture équestre

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 20 septembre 2018 - 462 mots

À Chantilly, une exposition raconte l’engouement des peintres français du XIXe siècle pour le thème des courses de chevaux.

Chantilly. Au XIXe siècle, l’iconographie des courses de chevaux a traversé la Manche en même temps que les courses elles-mêmes. « J’ai découvert ce sujet à l’occasion de mes recherches sur Degas, raconte Henri Loyrette, président directeur honoraire du Louvre et co-commissaire de l’exposition avec [l’écrivain et journaliste] Christophe Donner. Ce thème des courses, typique de la vie moderne, deviendra le terrain de la rivalité entre lui et Manet. »

Figure capitale du sporting art, l’Anglais George Stubbs (1724-1806) réalisait de véritables portraits de chevaux. Ce « très grand peintre totalement méconnu, voire inconnu en France », selon le commissaire, accueille le visiteur avec trois de ses œuvres dont une Étude d’« Éclipse » (vers 1769), cet étalon de légende. C’est en copiant le recueil de gravures de Stubbs, The Anatomy of the Horse, que Théodore Géricault (1791-1824) travailla jusqu’à devenir le maître incontesté de la peinture de chevaux. Quelques-uns des dessins préparatoires à ces gravures sont exposés au côté d’une copie de l’une d’elles par Géricault et d’une feuille d’Edgar Degas (1834-1917), Cheval broutant de profil à gauche, à laquelle Henri Loyrette est particulièrement attaché : c’est lui qui a retrouvé et acheté, pour le Musée d’Orsay, le dessin ici présenté au public pour la première fois.

Mais peindre les courses suppose de surmonter une difficulté : rendre le mouvement du cheval. Tout au long du parcours sont déclinées les solutions adoptées par les artistes pour relever ce défi. Ainsi, s’amuse le commissaire, cette exposition s’intéresse à l’histoire de la société (l’émergence des courses dans la vie des Français), à des recherches picturales « et à ces transferts qui se font constamment, au XIXe siècle, entre la France et l’Angleterre ». Le choix des œuvres et la scénographie conjuguent ces thèmes avec élégance.

De l’Angleterre viennent les courses et, pour les artistes, l’individualisation des chevaux, qui deviennent des modèles à part entière. Géricault sublime le mouvement et travaille l’anatomie, comme son ami Alfred de Dreux (1810-1860), bien meilleur lorsqu’il peint les courses que dans les portraits d’amazones qui font aujourd’hui sa renommée. Gustave Moreau apparaît en outsider. Degas et Manet parviennent à rendre la nervosité et la vitesse des montures et des cavaliers en passant, s’il le faut, par la distorsion des corps.

En fin de parcours sont présentées les recherches sur le mouvement menées par Étienne Jules Marey et Eadweard Muybridge grâce à la photographie. Mais c’est l’imagination qui a le dernier mot : dans sa lithographie Le Jockey (1899), Toulouse-Lautrec reste fidèle à ce que les historiens de l’art appellent le « galop volant » (les quatre pieds du cheval décollés du sol), l’allure la plus évocatrice de la vitesse même si elle n’existe que dans la tête des artistes.

Peindre les courses, Stubbs, Géricault, Degas,
jusqu’au 14 octobre, Domaine de Chantilly, salle du jeu de paume, 60500 Chantilly.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°507 du 21 septembre 2018, avec le titre suivant : Peinture équestre

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