Photographie

Miguel Rio Branco, la tentation du détail

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 4 décembre 2020 - 434 mots

PARIS

Peintre brésilien, Miguel Rio Branco se met à la photographie à la fin des années 1960. Ses travaux laissent entrevoir une attention particulière aux détails du quotidien et aux corps.

Paris. Miguel Rio Branco a commencé par la peinture avant de s’intéresser à la photographie en 1968. Il a alors 22 ans. Dès le début, son rapport au médium n’a rien à voir avec celui d’un photoreporter, bien que son statut de correspondant de l’agence Magnum depuis 1972 ait pu brouiller parfois son image. Sa démarche ne se détourne pas pour autant du réel. Bien au contraire.

Le focus proposé par Le Bal sur les années 1970-1992 réunit des photographies réalisées à New York, au Brésil, au Mexique ou encore au Venezuela. Cette sélection d’une cinquantaine de clichés s’avère d’autant plus intéressante que la plupart des négatifs et tirages noirs et blancs de ses débuts ont brûlé en 1980, dans son atelier à São Paulo.

Fragments du réel

À la différence de la dernière grande exposition consacrée à l’artiste en 2005, aux Rencontres d’Arles, puis à la Maison européenne de la photographie, à Paris, on ne trouvera toutefois pas ici les peintures ou les dessins réalisés durant ces vingt-deux années de production photographique. Leur absence peut manquer au premier abord compte tenu de ce qui nous est dit en préambule du parcours de l’artiste brésilien multidisciplinaire, mais l’efficacité des clichés est telle que l’on se laisse emporter par ce que Miguel Rio Branco retient du carnaval de Rio, d’une scène de rue ou d’intérieur d’un quartier pauvre de Salvador de Bahia, peuplé de prostituées.

Jeune homme en costume cravate à demi renversé, ivre mort, sur le capot cabossé d’une voiture, photographié à New York dans les années 1970-1972 ou mains sortant du vêtement usé d’un ouvrier d’une mine d’émeraude de Carnaíba : les instantanés de Miguel Rio Branco résument des existences avec une puissance formelle où le pathos s’exprime par les corps, l’expression d’un visage ou un geste, tel ce plan resserré d’un slip orange sur une peau sombre et des doigts aux ongles peints. Couleur ou noir et blanc, l’écriture visuelle frappe de bout en bout par son acuité formelle, humaine et ses partis pris. L’œil de l’artiste puise dans son époque sa substance, sa matière. Placée en exergue dans l’exposition, cette phrase de l’artiste brésilien mise en regard de ses photographies le rappelle : « Toute photographie est par nature un document mais mon intention n’a jamais été de documenter. Je capture par la photographie des fragments dissociés, épars de réel, tentant de répondre viscéralement à une question : pourquoi la photographie doit-elle être cela ? »

Miguel Rio Branco,
jusqu’au 6 décembre (l’exposition devrait être prolongée en janvier), Le Bal, 6, impasse de la Défense, 75018 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°556 du 27 novembre 2020, avec le titre suivant : Miguel Rio Branco, la tentation du détail

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