Michal Batory, affichiste poète

Par Anouchka Roggeman · L'ŒIL

Le 28 janvier 2011 - 420 mots

« Il y a deux types d’affiches : celles qui attirent l’attention avec des images choquantes, façon Benetton, et celles qui choquent avec des images belles et poétiques. Vous verrez que la poésie peut être aussi forte que la chair déchirée », explique Michal Batory.

Né en Pologne en 1959, cet artiste, dont on connaît souvent les affiches, mais moins le nom, descend directement des grands affichistes polonais, qui ont connu leurs heures de gloire dans les années 1960-1970. De cet enseignement pendant les temps forts du communisme, où l’art était surveillé et censuré, il a retenu une façon très particulière de jouer avec les codes, de subvertir les images, d’utiliser la métaphore pour exprimer des idées et en cacher d’autres. Utilisant les objets de notre quotidien (des allumettes, des fleurs, une nappe en papier, un oreiller…) qu’il photographie ensuite, il parvient, avec une justesse incroyable et beaucoup d’humour, à exprimer des éléments aussi inexprimables que la thématique, le ton ou l’ambiance d’une pièce de théâtre, d’un festival, d’un concert ou d’un roman.

Pour annoncer la saison musicale de l’Ircam en 1997-1998, il place au centre de l’affiche un diapason dont les deux lames sont remplacées par des cotons-tiges, augurant par là un festival qui promet de surprendre les oreilles des mélomanes les plus avertis. Pour Une femme sur le lit de Franco Brusati, une pièce grave qui traite de la relation dans un couple, mais aussi de la mort et du néant, il met en scène un coussin sans taie dont les deux côtés saillants prennent l’apparence de deux seins. Pour le festival de piano d’Enghien-les-Bains, qui cherche à s’imposer en tant qu’événement international, il photographie des mains de différentes couleurs et nationalités qui, superposées, ressemblent aux touches d’un clavier de piano.

Mais attention, pas question d’insinuer que l’artiste fait un usage intensif des outils sur ordinateur. Se définissant comme un artisan de l’affiche, Michal Batory fabrique, déforme ou fait germer lui-même dans son atelier la plupart des objets qu’il photographie. Reconstitué dans l’exposition, son atelier parisien est à l’image de son travail. On y trouve des meubles chinés aux puces, des photographies, des dessins, des tableaux, un établi recouvert de pinceaux, de crayons, de papiers, de matériaux en tous genres, de bouts de carton, bouts de tissus, des billes, une voiture faite à la main avec une canette… mais pas d’ordinateur.

Voir

« Michal Batory, artisan de l’affiche », Les Arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, Paris Ier, tél. 01 44 55 57 50, www.lesartsdecoratifs.fr, jusqu’au 1er mai 2011.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°632 du 1 février 2011, avec le titre suivant : Michal Batory, affichiste poète

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