XXE SIÈCLE

Les Pougheon se dévoilent à la Piscine

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 13 décembre 2017 - 496 mots

Riche d’un important fonds de dessins de ce Prix de Rome, le Musée d’art et d’industrie André-Diligent en propose une première approche.

Roubaix. L’une des œuvres fortes de la Piscine-Musée d’art et d’industrie André-Diligent est Le Serpent [Fantaisie] (1930), toile énigmatique de Robert Pougheon (1886-1955), déposée en 1990 par le Musée national d’art moderne lors de la création du musée roubaisien. La même année, la Piscine fit l’acquisition d’un fonds de 1 056 dessins du peintre et de documentation le concernant. Depuis, le musée entretient la recherche à son sujet. Un jeune historien de l’art, Louis ­Deltour, consacre son mémoire de ­master 2 à Robert Pougheon, dressant le catalogue de son œuvre et assurant le co-commissariat scientifique de l’exposition que lui consacre La Piscine avec Gunilla Lapointe, attachée de conservation.

Héritage de l’art classique
Si le fonds des dessins numérisés est accessible sur place grâce à une borne (et en ligne sur le site du musée), le visiteur peut admirer près de 200 d’entre eux, répartis par thèmes et par genres : amazones, décors peints, cartons de vitraux et tapisseries, maquettes pour des billets de banque et des illustrations… C’est tout le processus créatif de ce peintre académique, prix de Rome, qui apparaît, depuis le croquis sur le modèle témoignant de sa grande maîtrise jusqu’aux distorsions ingresques poussées à l’extrême pour les « Fantaisies » : profils de femmes transformés en chanfreins de chevaux ou musculatures amplifiées jusqu’à acquérir une vie propre. Les collages et la réutilisation de motifs d’une œuvre à l’autre trahissent les obsessions formelles héritées de l’art classique et des grands maîtres. L’historien de l’art Louis-Antoine Prat évoque, dans l’avant-propos du catalogue, Poussin et l’école de Fontainebleau. Ingres, Puvis de Chavannes, les cubistes et le surréalisme l’ont aussi nourri. Mais l’art de Pougheon va au-delà de l’amalgame d’inspirations et de l’éclectisme.

Valoriser le fonds et redécouvrir le peintre
La présente exposition est « importante et modeste », selon les mots de Bruno Gaudichon, directeur du musée. Importante parce que c’est la première consacrée au peintre, modeste en ce qu’elle ne montre qu’une toute petite partie du fonds de La Piscine. « Nous n’avons sollicité, ni même accepté aucun prêt, malgré de nombreuses propositions, assure Alice Massé, conservatrice adjointe. Nous voulions valoriser notre fonds et le gros chantier de récolement dans lequel nous sommes engagés. » Elle ne cache pas cependant qu’une exposition de grande envergure est envisagée, bien que pas encore programmée. « Les musées de Nancy et Nevers doivent encore travailler sur leurs fonds. Nous y adjoindrons des œuvres des proches de Pougheon : Jean Dupas, Jean Despujols, Raphaël Delorme, des artistes présents ici dès l’espace de préfiguration de la Piscine. »

Le musée n’en est donc, selon la conservatrice, qu’à « une première étape dans le cheminement de redécouverte du peintre ». Toute une école se cache derrière celui-ci, celle du « groupe de Rome », ces Ingristes à tendance cubiste qui séjournaient ensemble dans la capitale italienne au cours des années 1920, dont nombre d’œuvres sont à rechercher dans les collections privées.

Robert Pougheon, un classicisme de fantaisie,
jusqu’au 7 janvier 2018, La Piscine-Musée d’art et d’industrie André-Diligent, 23, rue de l’Espérance, 59100 Roubaix.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°491 du 15 décembre 2017, avec le titre suivant : Les Pougheon se dévoilent à la Piscine

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