Les contes du réel de Ho Tzu Nyen

La manière d’interroger l’histoire de l’Asie du Sud-Est, et la virtuosité de l’artiste – cinéaste et metteur en scène singapourien – dans l’usage des systèmes algorithmiques et de l’intelligence artificielle pour la raconter produisent des récits entre réalité, fiction et mythe qui exposent la manière dont l’histoire d’une ville, d’un pays ou d’une région a été écrite et transmise. « Une grande partie de mon travail est de comprendre le passé, mais aussi de pouvoir changer les perspectives et de produire constamment des versions de lectures alternatives et de regards différents », explique Ho Tzu Nyen. À travers quatre vidéos et des discours génératifs produits par l’IA mis en regard, l’installation « Phantoms of Endless Day » commandée par la Fondation LUMA fait dialoguer quatre visions distinctes du chaos des derniers jours de la Seconde Guerre mondiale à Singapour. Chacune est interprétée par des protagonistes différents : un escadron japonais occupant Singapour, des guérilleros communistes, deux agents des Forces spéciales britanniques et un duo formé par un esprit de la forêt et un tigre-garou… Le tigre-garou et le tigre malais sont des personnages récurrents des films de Nyen. On retrouve ce dernier dans « One or Several Tigers », une installation de 2017 se déployant sur deux écrans et qui oppose un tigre de malais, médium des esprits ancestraux dans la culture malaise et l’architecte irlandais, George Drumgoole Coleman (1795-1844) qui a contribué à façonner la ville de Singapour. Dans l’immense Halle de la Mécanique, d’autres films et installations majeures conçues au cours de ces dernières années sont montrés, la plupart liés à un long métrage de l’artiste entamé en 2011 – et resté inachevé –, devenu matrice de toutes ces créations.