Photographie

Les aventures de deux cousines à la Fondation Henri Cartier-Bresson

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 26 mars 2024 - 653 mots

PARIS

Alessandra Sanguinetti a documenté dans une grande proximité avec son sujet la vie de deux fillettes qui grandissent dans une Argentine rurale.

Alessandra Sanguinetti, Juana's bed, 2004. © Alessandra Sanguinetti / Magnum Photos
Alessandra Sanguinetti, Juana's bed, 2004.
© Alessandra Sanguinetti / Magnum Photos

Paris. Alessandra Sanguinetti est née à New York en 1968. Deux ans après, sa famille déménageait à Buenos Aires où elle a grandi et vécu jusqu’en 2002 avant de s’installer en Californie. Les exploitations agricoles de ses parents dans la région de Buenos Aires, cadres marquants de son enfance, ont fourni la matière à l’un de ses premiers projets et livres : « On the Sixth Day » (« au sixième jour »), sur la vie de la ferme du point de vue des animaux. C’est au cours de la réalisation de ce projet qu’elle a croisé pour la première fois, en 1996, Guille et Belinda, deux cousines alors âgées de 4 et 5 ans. Trop concentrée sur son reportage en cours, elle s’est peu intéressée aux fillettes à ce moment-là. Elle les avait photographiées sans en retenir les images. Leur manière d’être « impressionnantes et bien vivantes généra toutefois une foule de questions, d’idées et d’images », dit-elle rétrospectivement. Depuis, la photographe membre de l’agence Magnum documente leur vie au fil de ses séjours en Argentine, et « Les Aventures de Guille et Belinda » sont devenues le projet phare d’un travail régulièrement exposé et édité.

Les 49 photographies sélectionnées par Clément Chéroux et Pierre Leyrat pour l’exposition de la Fondation Henri Cartier-Bresson couvrent vingt-quatre années de complicité et de plaisir « qu’elles ont eus à créer des images ensemble », comme les trois protagonistes de ces « aventures » le soulignent dans le livre d’entretiens Over Time/Au fil du temps (éd. Mack, 2024), entretiens menés par le directeur de la fondation et le responsable des expositions. « Cela nous permettait de laisser libre cours à notre imagination et de faire preuve de créativité avec des moyens limités », précise Belinda Stutz – et « de renforcer les liens entre Belinda et moi », ajoute Guillermina Aranciaga.

Alessandra Sanguinetti, The Funeral, 1999. © Alessandra Sanguinetti / Magnum Photos
Alessandra Sanguinetti, The Funeral, 1999.
© A. Sanguinetti / Magnum Photos
L’imaginaire de l’enfance, chez la photographe aussi

Le développement chronologique sur les cimaises de la Fondation Henri-Cartier-Bresson voit les fillettes grandir et devenir mère. Les images allégoriques des histoires qu’elles inventaient avec Alessandra Sanguinetti lorsqu’elles étaient enfant laissent place, à partir de l’adolescence, à des photographies plus documentaires et aux étapes marquantes de leur vie de jeune fille puis de jeune femme, se mariant ou posant enceinte. On les suit dans leur évolution, capté par le souffle de vie des images et de ce qu’elles suggèrent de l’imaginaire de l’enfance, à l’âge où l’on se crée des fictions, avant que ne pointent, à l’adolescence, l’ennui ou d’autres rêves. Le regard de la photographe n’a rien perdu de celui de l’enfant qu’elle a été ni oublié cette période de sa vie déjà explorée dans d’autres expositions et publications. À la fondation, les « Aventures de Guille et Belinda » font la part belle aux images correspondant à la période de l’enfance des deux cousines, images contenues dans le premier volume publié et sous-titré The Enigmatic Meaning of Their Dreams (« l’énigmatique sens de leurs rêves », Nazraeli Press, 2010, non traduit). Un tiers du parcours est réservé aux photographies du second volume (« l’illusion d’un été éternel », éd. Mack, 2020, non traduit), sur leur vie de jeune fille et de jeune mère, qu’accompagnent quatre ou cinq vues de paysages ou de la vie de la ferme parmi lesquelles celle d’une table dressée, aux assiettes resserrées, n’attendant plus que ses convives.

La possibilité de consulter sur place ces deux ouvrages et le recouvrement d’un mur entier d’archives photographiques exposées pour la première fois permettent d’élargir le regard aux autres membres de la famille de Guille et Belinda, aux hommes en particulier, figures centrales de cet univers de gauchos et de fermiers. En attendant la sortie du long-métrage sur les aventures de Guille et Belinda, le visiteur peut visionner une vidéo rassemblant sept extraits de films qu’Alessandra Sanguinetti a réalisés parallèlement à ses prises de vue.

Alessandra Sanguinetti - Les Aventures de Guille et Belinda
Alessandra Sanguinetti. Les aventures de Guille et Belinda,
jusqu’au 19 mai, Fondation Henri Cartier-Bresson, 79, rue des Archives, 75003 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°629 du 15 mars 2024, avec le titre suivant : Les aventures de deux cousines à la Fondation Henri Cartier-Bresson

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