Paysage

Leçon d’histoire

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 2 juin 2015 - 421 mots

Retour sur le prix de Rome et l’avènement du paysage historique au Musée d’art et d’histoire de Meudon.

MEUDON - Aujourd’hui que le Lion d’or de la Biennale de Venise, le Turner Prize ou encore le prix Marcel Duchamp sont devenus les lauriers les plus convoités par les artistes contemporains, il est intéressant de faire un pas de côté et de se remémorer le sésame absolu que représentait le prix de Rome aux yeux des apprentis peintres des XVIIIe et XIXe siècles. L’ancêtre de ces récompenses, créé en 1663 et sacrifié sur l’autel de Mai-68, avait pour avantage d’ouvrir à son lauréat les portes de l’Académie de France à Rome. Avec la complicité des Amis du paysage français, le Musée d’art et d’histoire de Meudon (Hauts-de-Seine) se penche plus particulièrement sur le cas du grand prix de Rome du paysage historique, créé en 1817 en réponse à la prééminence prise par la Nature, et l’art de la dépeindre pour elle-même.

Bois calme et mare lisse
Par le biais d’une sélection certes réduite mais ciblée, l’exposition meudonnaise témoigne d’un moment clé de l’histoire de l’art, lorsque le paysage conçu tel un décor pour une scène historique, religieuse ou mythologique est sur le point de devenir le sujet principal du tableau. Théoricien du paysage, Pierre Henri de Valenciennes est ici évoqué par un Narcisse se mirant dans l’eau qui pose les fondements du genre : un cadre naturel composé en atelier en fonction de l’action qui s’y déroule, en l’occurrence l’orée d’un bois calme baignée dans une douce lumière tangentielle et une mare aussi lisse qu’un miroir… Plusieurs grands prix sont ici présentés, dont le premier, obtenu par Achille-Etna Michallon, est évoqué par son esquisse présumée (Démocrite et les Abdéritains, 1817). Gros plan est fait sur le concours de 1825, avec ses étapes éliminatoires au dessin sur papier et sur calque, et le tableau La Chasse de Méléagre grâce auquel André Giroux remporta l’épreuve.
Précis dans sa manière de décrire la procédure stricte à laquelle se soumettent les étudiants, le parcours juxtapose les toiles dont le même décor théâtral quoique « naturel » semble démultiplié à l’infini. L’accrochage sait aussi marquer la rupture esthétique avec les panoramas que découvrent les heureux élus en Italie, qui aboutira à une seconde vague d’artistes trouvant refuge en forêt de Fontainebleau. Là, le paysage prend vie peu avant que le prix ne s’éteigne officiellement en 1863. En cette année du Salon des refusés, le paysage historique ne faisait plus le poids face au Déjeuner sur l’herbe d’Édouard Manet.

Le paysage historique de P.-H. de Valenciennes À J.-B. Camille Corot. Le Prix de Rome (1817-1863)

Jusqu’au 12 juillet, Musée d’art et d’histoire de la Ville de Meudon, 11, rue des Pierres, 92190 Meudon, tél. 01 46 23 87 13, www.meudon.fr, tlj sauf lundi 14h-18h, entrée 2,50 €. Catalogue, Les Amis du paysage français (Meudon), 64 p., 15 €

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°437 du 5 juin 2015, avec le titre suivant : Leçon d’histoire

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque