Au Jeu de Paume

Le socle comme sculpture

Une \"rétrospective\" de Didier Vermeiren

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 1 mai 1995 - 482 mots

Héritier légitime de la sculpture moderne, et singulièrement de Brancusi, le travail de Didier Vermeiren, présenté à la Galerie nationale du Jeu de Paume après une première exposition à la Kunsthalle de Zurich, met en évidence la logique implacable d’un parcours commencé voilà un peu plus de dix ans.

PARIS - La sculpture de Didier Vermeiren (né à Bruxelles en 1951) a, pour les amateurs d’art contemporain, un air relativement familier. Elle pourrait d’abord leur sembler prolonger directement les problèmes que les minimalistes se posaient dans les années soixante, et qui avaient réduit à presque rien les éléments de leurs œuvres.

Pourtant, si Vermeiren doit quelque chose à cette esthétique épurée, ses références sont plus classiques et remontent aux origines de la sculpture moderne, à celle de Canova, Rodin et Brancusi. Dans un temps où les doutes s’imposent avec plus de force et d’efficace que les certitudes, Vermeiren s’en remet à des constats aussi simples que possible. "S’il y a une chose dont on est certain, dit-il, c’est où démarre la sculpture. Elle démarre au sol ; après, en hauteur et sur les côtés, elle n’a pas de limites."

La réflexion qu’il mène sur son art est moins théorique qu’il n’y paraît, et c’est avec une simple rigueur historique qu’il poursuit son travail. Au commencement est le socle, dont Brancusi a montré l’indépendance par rapport à ce qu’il supporte, et l’importance cruciale pour la modernité, jusqu’à en faire le module principal de sa Colonne sans fin.

En 1983, Vermeiren prit les mesures exactes d’un socle d’une statue de Rodin qu’il réalisa dans le matériau de l’œuvre qu’il supportait. Renversement elliptique et quelque peu mystérieux des processus artistiques, qui aurait pu sans doute rester cantonné au seul espace du musée et ne donner lieu qu’à un art pour historiens d’art en mal de pensée.

Mais si ces premières œuvres sont fondatrices, dans tous les sens du terme, du travail de Vermeiren, il a su ne pas s’en tenir là et lui trouver des issues surprenantes. Des simples parallélépipèdes en plâtre, en fer ou en bronze, il est passé à des structures plus légères, souvent montées sur roulettes, créant alors des sculptures curieusement immobiles. "Les roues sont là, explique encore Vermeiren, mais le mouvement n’est pas nécessaire. La sculpture ne doit pas rouler pour fonctionner." Ni littéral ni métaphorique, le mouvement est seulement induit, et son œuvre trouve sa véritable autonomie.

Aux mêmes dates, se déroulera dans le même lieu une exposition des peintures monumentales d’Helmut Federle, présenté, lui, comme un "lointain héritier des mouvements constructivistes" et ancien héros du "Néo géo" qui avait été promu il y a quelques années. La confrontation entre le sculpteur et le peintre devrait donner quelques indications sur les voies qui s’offrent aujourd’hui à l’artiste pour trouver une issue à l’esthétique postmoderne.

"Didier Vermeiren, Helmut Federle", Galerie nationale du Jeu de Paume, du 3 mai au 15 juin.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°14 du 1 mai 1995, avec le titre suivant : Le socle comme sculpture

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