Art contemporain

Le néo-romantisme de Françoise Pétrovitch

Par Itzhak Goldberg · Le Journal des Arts

Le 30 juin 2023 - 338 mots

PARIS

Ses silencieux visages d’adolescents investissent le Musée de la Vie romantique.

Paris. Le romantisme n’est plus ce qu’il était. Victime des lieux communs et inadapté à une époque désabusée, il a perdu de son aura. Les souffrances du jeune Werther décrites par Goethe ou la fleur bleue de Novalis ne sont plus à la mode. Est-ce pour rajeunir cette image que le Musée de la Vie romantique a fait appel à Françoise Pétrovitch ? Le choix n’est pas surprenant car l’artiste est habituée à ce type de contribution, pour le Musée de la chasse et de la nature à Paris en 2011, la Villa Savoye à Poissy (Yvelines) actuellement (jusqu’au 24 septembre) ou des décors de ballets.

Ici, son intervention se fait en deux temps. « Il s’agissait pour moi de m’immiscer dans la collection, avec retenue, mais en investissant pleinement les espaces d’atelier »,écrit-elle dans le catalogue. Ainsi, un dialogue imaginaire s’établit avec George Sand ou Pauline Viardot, dont les portraits, sur fond rose bonbon, tranchent avec les couleurs sombres des toiles d’Ary Scheffer ou d’Auguste Charpentier. Mais c’est dans l’atelier que l’on trouve la galerie habituelle des adolescents, les acteurs principaux de l’univers de Pétrovitch. Les lavis d’encre et même la peinture à l’huile ne sont pas opaques ; le tout peut se diluer d’un instant à l’autre, comme les personnages, ces figures d’incertitude. Anonymes, ils sont enfermés dans leur mutisme, à l’écart de toute agitation, absents. Peu d’échanges ont lieu dans ce monde sans adulte. Même lorsque les yeux sont ouverts, le regard, oblique, ne rencontre que rarement celui du spectateur. Un seul geste se répète qui ne s’adresse à personne : une main tenant une cigarette. Plus rares chez l’artiste, quelques paysages aquatiques, semi-abstraits, intitulés « Iles », rappellent que la nature fut une composante essentielle du romantisme. On hésite face à cet ensemble. L’artiste, très – trop ? – prolifique, prend peut-être le risque d’une certaine répétition. Pourtant, elle réussit à éviter le faux-semblant du paradis perdu en mettant en scène l’image d’une solitude partagée, qui joue habilement avec la mièvrerie romantique.

Françoise Pétrovitch, Aimer. Rompre,
jusqu’au 10 septembre, Musée de la Vie romantique, hôtel Scheffer-Renan, 16, rue Chaptal, 75009 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°613 du 9 juin 2023, avec le titre suivant : Le néo-romantisme de Françoise Pétrovitch

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