L’art, la guerre, la vie

Les images choisies, extraites des réseaux sociaux iraniens, rendent compte du mouvement de protestation contre le pouvoir des mollahs, suite à l’assassinat de Jina Mahsa Amini, jeune femme kurde iranienne, par la police des mœurs pour port incorrect du voile, en septembre 2022. Contre cet acte barbare, le peuple iranien s’est soulevé de manière inédite. Au premier rang, des femmes, suivies par des hommes, se sont révoltées par des actes symboliques et poétiques divers, comme se couper les cheveux, en résonance forte avec les mythes collectifs. La puissance de ce combat populaire effraie les gouvernants, qui condamnent les manifestations pacifiques par la torture, l’humiliation et l’assassinat. Cette violence est passée sous silence auprès de la plupart des grands médias occidentaux. La présence de ce montage dans une exposition d’art pose une question essentielle. Qu’est-ce que l’art ? Quels sont ses liens avec les événements du monde ? Non, comme le disait Pablo Picasso, « la peinture n’est pas faite pour décorer les appartements ; c’est un instrument de guerre offensive et défensive contre l’ennemi ». Placé sous le signe de cette célèbre citation, le discours de présentation de l’exposition, tout comme le parti pris curatorial de la commissaire Isabelle de Maison Rouge, rappelle l’urgence en art de faire combat. Les onze artistes réunies, des femmes, proposent des œuvres qui invitent le spectateur à se poser des questions sur l’état du monde. Bien sûr, la condition féminine y est interrogée, mais leurs œuvres transcendent cette question du genre. Elles visent à révéler toutes formes d’impensés, de tabous et d’oppressions. Elles participent d’un même mouvement d’insoumission qui tend à libérer notre force vitale et tout ce qui fait de nous des êtres humains.