La photo à Paris... en dehors de Paris Photo

L'ŒIL

Le 1 novembre 2005 - 1092 mots

À côté de l’incontournable Paris Photo, D’autres expositions de photographies sont à voir dans la capitale. Gros plan sur quatre galeries.

Paris Photo, la grand-messe des gens d’image, le premier rendez-vous mondial dédié entièrement à la photo, ne peut accueillir la totalité des galeries parisiennes. D’autant plus que, d’années en années, le nombre d’exposants étrangers ne cesse de grossir jusqu’à représenter aujourd’hui les trois quarts des exposants. Et pour être de la partie, les critères de sélection sont multiples. En particulier le prix (275 euros le m2) qui en décourage plus d’un (à 25 m2 le stand moyen, ça se comprend...). Mais qu’on se le dise, aussi prestigieux soit ce rendez-vous, il y a une vie pour la photo en dehors de Paris Photo. La preuve par quatre.
Quatre galeries parisiennes, parmi un grand nombre absentes du Carrousel, ont retenu notre attention et méritent le détour, de Saint-Germain-des-Près à la Bastille, en passant par l’île Saint-Louis.

Martin Parr chez Kamel Mennour
On commence par un alléchant menu chez le grand chef du cliché, côté quartier Latin : Kamel Mennour. Celui chez qui l’on va pour voir de la photo contemporaine de valeur sûre et pour être vu dans des vernissages ultra hype (Araki, Jan Saudek, Stephen Shore…) n’expose plus à Paris Photo depuis deux ans. En revanche, il ne rate plus une seule Fiac (Foire internationale d’art contemporain, début octobre). « Ce n’est pas que nous ne voulons plus aller à Paris Photo, explique l’équipe de la
galerie tandis que Kamel est en voyage à l’autre bout du monde, on s’entend très bien avec les
organisateurs, mais nous devons faire des choix. Nous participons à six foires par an : Miami, Bâle, Bruxelles, Turin, Barcelone… Et nous ne pouvons pas tout faire ! Il y a deux ans, en même temps que Paris Photo, nous étions sur quatre foires à la fois ! En outre, nous nous sentons plus proches de la programmation de la Fiac, plus contemporaine… Mais cela ne nous a pas empêché d’être présents à Paris Photo durant quatre ans et d’exposer du Pierre Molinier sur de la toile de Jouy. » Tous ceux qui ont eu la chance de voir ce stand magnifiquement scandaleux orné des cuisses gainées de bas résille du sulfureux Bordelais ne peuvent effectivement pas oublier le passage de Mennour à Paris Photo. Cette année, il n’en sera pas. Du 18 novembre (en plein Paris Photo) au 31 décembre, il expose chez lui et du « lourd » : Martin Parr (ill. 1, 2, 3), plus branché que jamais après la belle expo de la Maison européenne de la photo (cf. L’Œil n° 572) qui n’a pas désempli depuis l’inauguration. Mennour en rajoute une couche et quand c’est Parr, on ne dit pas non. On y court, on y rit un grand coup et on y revient.

Paysages de Didier Mignot
Non loin de la galerie Mennour, Nicole et Léon Herschtritt exposent jusqu’au 31 décembre, leur « coup de cœur » : Didier Mignot (ill. 4), « extrémiste et autodidacte », nous dit-on. Et on veut bien les croire ces deux époux, passionnés de photo chez qui l’on a vu d’émouvantes photos d’Elliot Erwitt, de Robert Capa, de Gary Winogrand… Une fois n’est pas coutume, ces collectionneurs passionnés de photo américaine et humaniste exposent un artiste contemporain, fan de Melville et de Kubrick, de contes de fées et de légendes arthuriennes qui fait de la photo comme on se rêve un monde enchanté. Il retravaille ses clichés avec des encres de couleur transparentes et repeint les paysages de son imagination, surréalistes et parfois angoissants. Voici donc cet univers fantasmé sur les cimaises des Herschtritt qui confient avoir été recalés à l’examen de passage de Paris Photo : « Aux débuts du salon, nous pensions que nous n’avions pas besoin d’y être car nos clients étaient pour la plupart américains. Cette année et pour la première fois, nous avons déposé notre candidature en mettant en avant les images grand format et ultra contemporaines de l’Allemand Rolf Kestermann que nous pensions être dans l’air du temps… On a reçu une lettre de refus sans réelle explication. Dommage ! Le photographe lui-même nous aidait à participer ! Je crois que Paris Photo souhaite être plus international ce qui ne favorise pas toujours les galeries parisiennes… »
Les Herschtritt ne seront donc pas de la fête alors que l’on verra leur fils, Laurent « qui n’est pas galeriste mais qui participe aux salons ». En tout cas, on ne se privera pas d’aller jeter un œil aux paysages mentaux de Mignot.

Madé accueille Zacharias
Plus près de la Seine, pour ne pas dire en son cœur, sur l’île Saint-Louis, une autre galerie ne se déplacera pas jusqu’au Louvre : la galerie Madé, inaugurée en 2000. Son propriétaire aurait bien aimé, lui aussi, rejoindre le Carrousel, mais… « je n’ai même pas postulé, cela coûte trop cher et ma galerie ne tourne pas assez pour pouvoir m’offrir un stand. Je suis plus agent de photographe que marchand. Mais si j’avais les moyens, j’irais volontiers. C’est un lieu incontournable pour ceux qui ont pignon sur rue. » Pas de pignon, pas de salon. On se consolera gaiement avec les images de David Zacharias (ill. 6) qui mixe illustrations et photos, exposées sur la galerie de l’île, du 10 novembre au 16 décembre.

Le Brésil chez Claude Samuel
De l’autre côté de la Seine, à la Bastille, le galeriste Claude Samuel nous fera voyager avec les photos du Brésil de François Fontaine (ill. 5, que l’on a vu, en janvier et en Chine, à la très réussie Biennale de photo de Canton). Samuel est lui aussi un recalé de Paris Photo. « C’est à croire que l’espace du Salon est de plus en plus restreint. J’y ai participé durant trois ans et ai déposé un dossier pour 2005 avec les portraits-robots de Leandro Berra remarqués, cet été, aux Rencontres d’Arles. On m’a répondu qu’il n’y avait plus de place… Dommage, nous qui souhaitions être novateurs, peut-être l’a-t-on trop été ! »
De quoi s’en mettre plein les yeux, donc, dans ce Paris photo « off » et… gratuit ! Rappelons que le
Salon parisien qui est un événement international a bel et bien un prix : 15 euros l’entrée et une sélection qui ne fait pas de cadeaux aux galeristes de la capitale.

Les galeries

- Galerie Kamel Mennour, PARIS, 60 rue Mazarine, VIe, tél. 01 56 24 03 63. - Galerie Nicole et Léon Herschtritt, PARIS, 5 rue Jacques Callot, VIe, tél. 01 56 24 34 74. - Galerie Madé, PARIS, 6 rue Le Regrattier, IVe, tél. 01 53 10 14 34. - Galerie Claude Samuel, PARIS, viaduc des arts, 69 avenue Daumesnil, XIIe, tél. 01 53 17 01 11.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°574 du 1 novembre 2005, avec le titre suivant : La photo à Paris... en dehors de Paris Photo

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