Grenoble

La ligne d’une collection

Épisode II : les dessins français du Musée

Le Journal des Arts

Le 13 décembre 2011 - 553 mots

GRENOBLE - Après l’exposition « De chair et d’esprit » consacrée aux dessins italiens en 2010, le Musée de Grenoble poursuit l’analyse de son fonds d’art graphique ancien, riche de 3 500 feuillets provenant, en majeure partie, du legs Mesnard en 1890.

Pour ce volet français, Guy Tosatto, directeur du Musée, a réuni un comité scientifique éclectique, mêlant jeunes chercheurs et sommités, afin de créer une émulation, une confrontation des savoirs et des approches. Guillaume Kazerouni, historien de l’art spécialiste de la première moitié du XVIIe siècle français, ou Pierre Rosenberg, président-directeur honoraire du Musée du Louvre, se sont lancés dans l’étude de plus de mille œuvres. L’apport d’Éric Pagliano, qui s’était penché sur le corpus transalpin pour la précédente exposition, a permis de faire le lien entre les deux aires géographiques. Après restauration, de nombreux dessins ont pu être (ré)attribués ou réinterprétés ; peu à peu, l’architecture de la collection commence à émerger, avec ses points forts : les années 1630-1640, les paysages du XVIIIe siècle et les dessins néoclassiques ; et ses lacunes, ainsi l’absence de Nicolas Poussin.

Parcours didactique
En présentant les 125 dessins les plus remarquables du fonds – dont 80 % d’inédits –, « L’idée et la ligne » donne un aperçu du travail effectué. Le parcours chronologique court de la première école de Fontainebleau, encore tributaire de l’influence italienne, aux prémices du néoclassicisme à la fin du XVIIIe siècle. Des différents ateliers, dont l’ambiance foisonnante et colorée est traduite ici par des murs d’un bleu éclatant, se détache une variété de techniques et de styles : le développement de la pierre noire rehaussée de blanc autour de Simon Vouet ; l’atticisme parisien de Philippe de Champaigne. On relève également l’essor du médium, au fondement de toute création pour Charles Le Brun et son Académie ; l’avènement de la couleur dans l’entourage de Fragonard, et enfin le tracé dur et précis du néoclassicisme davidien. Grâce aux cartels détaillés et illustrés, le visiteur peut suivre la démarche scientifique qui a présidé à la présentation, à l’exemple de cette Étude de femme nue assise, initialement attribuée à Charles Joseph Natoire mais dont le trait linéaire, le nez pointu et le fond bleu correspondaient davantage au geste de Noël Hallé. Sur les cimaises, les feuilles célèbres, Apollon et Daphné de Louis de Boullogne ou Frise dans le genre de l’antique, mort d’un héros de David, côtoient des artistes plus confidentiels : Boucher de Bourges, la lignée des Parrocel ou Jean-Baptiste Regnault.

L’exposition réserve son lot de surprises, avec un très beau Portrait de Louis XV réalisé d’après nature par Carle Van Loo, ou Un paysage au bord d’une rivière de Pierre-Antoine Patel, d’une incroyable modernité. Prochaines étapes : les dessins nordiques, qui signeront la fin du triptyque en 2014, et la mise en ligne progressive du fonds. L’opération permettra peut-être à d’autres spécialistes, en examinant des feuillets restés anonymes, de révéler de nouveaux trésors.

L’IDEE ET LA LIGNE. DESSINS FRANÇAIS DU MUSEE DE GRENOBLE (XVIE-XVIIIE)

Commissariat général : Guy Tosatto, directeur du Musée de Grenoble, Commissariat : Guillaume Kazerouni, historien de l’art, et Valérie Lagier, conservatrice en chef du patrimoine au Musée de Grenoble.
Nombre d’œuvres : 125

Jusqu’au 12 février 2012, Musée des Grenoble, 5, place de Lavalette, 3800 Grenoble, tél. 04 76 63 44 44, www. museedegrenoble.fr, tlj sauf mardi 10h-18h30.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°359 du 16 décembre 2011, avec le titre suivant : La ligne d’une collection

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