La colère devient une arme

Deux mouvements sud-américains dévoilent leurs actions artistiques

Le Journal des Arts

Le 1 décembre 2000 - 470 mots

Dans le cadre de l’exposition « Visions latino américaines », le Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, à Madrid, devient un lieu d’expérience et d’échange en présentant deux groupes d’artistes : « mujeres creando », originaire de Bolivie (La Paz), et le groupe brésilien Rhr (Rio de Janeiro). Leur travail se concentre dans le champ de l’action et ne s’inscrit pas dans la forme créative propre.

MADRID - “Mujeres Creando”, créé en 1995, est un groupe composé uniquement de femmes (dont Maria Galindo, Julieta Paredes et Florentina Alegre). Elles réinventent un nouveau courant de pensée critique et artistique dans le monde bolivien, pour lequel ne sont nécessaires ni toile, ni espace pour érudit ou amateur d’art. Leurs œuvres sont leurs actions et le résultat social qu’elles peuvent engendrer. Persécutées, arrêtées, menacées de mort, ces femmes mènent un engagement total, et luttent à travers l’art – au-delà des partis politiques – contre l’injustice et le machisme dominants de leur société. Elles cherchent à créer un événement conduisant à une réelle transformation. Des bombes de peinture sont leurs “armes-pinceaux”. Le cri est l’essence de leur discours. Trois formes différentes de leur travail envahissent le musée : des vidéos montrant leurs performances effectuées pour un programme de la chaîne de télévision bolivienne PAT ; puis, sur l’ensemble des murs des graffitis, échos de ceux qu’on voit dans les villes ; et enfin, au centre de la pièce une table, une chaise, créant un lieu de dialogue avec les artistes.

De même, le Rhr, né à Rio de Janeiro en 1998, comprend des personnes liées ou non au monde artistique, et propose un nouveau courant critique au Brésil. Il se structure autour d’une idéologie qui a pour centre un discours basé sur le vide. Leur action consiste en diverses interventions – sorties individuelles ou en groupe –, menés afin de produire un impact visuel, imprécis mais effectif. Ils ont pour but de déstabiliser une humanité à leurs yeux trop homogène et trop attentive à l’ordre. N’ayant pas d’objet à montrer, cette confrérie n’expose pas à proprement parler. Mais certains membres circuleront dans Madrid et participeront à toutes les manifestations liées à l’événement. Cette double présentation souhaite dévoiler deux extrêmes de la création dans le monde latino-américain, d’une part ces femmes qui font du cri contre l’injustice leur création, et de l’autre un groupe qui tente de créer un monde parallèle, critique de celui qui nous entoure. Les unes semblent lutter avec les mains dans la terre, les seconds avec les mains vers le ciel.

- VISIONS LATINO-AMÉRICAINES, du 12 décembre jusqu’en mars 2001 et MUJERES CREANDO du 12 décembre au 28 janvier, Museo Nacional de Arte Reina Sofia, Santa Isabel 52, 28012 Madrid - Espagne, tél : 34 91 467 50 62, tlj de 10h à 21h sauf dimanche de 10h à 14h30.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°116 du 1 décembre 2000, avec le titre suivant : La colère devient une arme

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