Kudo... atomique !

Par Roxana Azimi · L'ŒIL

Le 1 août 2007 - 375 mots

Il est des noms qui sombrent dans l’oubli pour avoir été d’avant-garde trop tôt. C’est le cas de l’artiste japonais Tetsumi Kudo, présenté à la Maison Rouge.
Avec l’artiste Yayoi Kusama, Kudo est l’un des créateurs emblématiques du Japon post-atomique, symbole d’une jeunesse foudroyée dans ses référents. L’ombre d’Hiroshima pèse de fait sur une œuvre traversée par un profond pessimisme. Un pessimisme qui ne vire toutefois jamais à la nostalgie d’une Arcadie perdue. Chez Kudo, le rire accompagne le dérisoire, signifié notamment par l’utilisation de matériaux pauvres. Les sexes géants récurrents dans son travail participent d’ailleurs de cette dérision. « Pour Kudo, les lois du hasard nous gouvernent, nous sommes des jouets dans le système de programmation génétique, explique Anne Tronche, commissaire de l’exposition. Dans ses œuvres, le phallus n’est pas synonyme de fertilité. » Ce déferlement phallique n’est d’ailleurs pas sans évoquer l’univers de l’artiste française Louise Bourgeois.
Proche des néo-dadas au Japon, Kudo s’installe à Paris en 1962. Il ne participera toutefois pas aux combats des années 1960. « Mai 1968 lui aura semblé dérisoire puisqu’au bout du compte, pour lui l’homme reste un pantin », observe Anne Tronche. Ses premières œuvres, qui ne figurent pas dans l’exposition, traitent de la question de la réaction en chaîne par le biais d’un enchevêtrement de fils de couleurs.
Les fils, on les retrouve dans Philosophy of impotence, qui accueille le visiteur dès l’entrée. Cette pièce réalisée en 1962 à la galerie Raymond Cordier se compose de fils descendant du plafond et de sexes semblables à des cocons. Kudo a aussi beaucoup décliné le thème de l’enfermement, avec des boîtes dont l’extérieur est peint comme un dé. Plus que la mort, l’idée de mue tend à sourdre dans ses œuvres. On y voit non pas des corps déchiquetés, ou de la chair sanguinolente, mais plutôt des peaux translucides, comme les ombres blanches d’Hiroshima. Pour donner chair et vie à l’exposition,
Anne Tronche a veillé à présenter tout au long du parcours les photos des performances qui ont souvent accompagné ou activé les œuvres.

« Tetsumi Kudo, la Montagne que nous cherchons est dans la serre », La Maison Rouge, 10, bd de la Bastille, Paris XIIe, tél. 01 40 01 08 81, jusqu’au 13 mai 2007.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°589 du 1 mars 2007, avec le titre suivant : Kudo... atomique !

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