Joseph Kosuth

Quelques questions sur l’art

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 1 décembre 2006 - 356 mots

Héros décisif de l’art conceptuel, Joseph Kosuth installe un travail inédit dans les nouveaux locaux parisiens de la galerie Almine Rech. À la fin des années 1960, l’Américain avait largement contribué
à la redéfinition de l’art et de son objet.
Documents, textes, livres, écrits, schémas, installations venaient servir un propos radical visant à désigner un art dont la fonction ne pouvait être qu’artistique.
Évacuant la subjectivité de l’artiste, les questions d’ordre formel ou même métaphysique et la composante visuelle de l’art, les propositions de Kosuth visaient à exprimer un art devenant son propre objet de démonstration, se définissant continuellement par lui-même et par sa propre pratique. « Une œuvre d’art est une tautologie », résumait-il alors. Autrement dit, l’art est la définition de l’art.
Au premier étage de la galerie, en écho à ces travaux iconiques et historiques, Kosuth a d’ailleurs placé un néon, écrivant en cinq couleurs différentes : A Sentence in Five Colors (une phrase en cinq couleurs). Au rez-de-chaussée, moins drastique, mais tout aussi analytique, la ligne de Kosuth est maintenue au plus près de ses schémas premiers.
Au sol, ne ménageant qu’un étroit espace de circulation, l’artiste a disposé une impressionnante architecture de livres couvrant l’ensemble du rez-de-chaussée de la galerie. À peu près ordonnés, empilés à hauteur de chevilles, Flaubert, Heiddegger, Camus, polars, essais, correspondances ou biographies, les quelque centaines de bouquins matérialisent le contexte évoqué par les images fixées aux murs : de grandes photographies en noir et blanc fixées sur des planches lumineuses, cadrant des bibliothèques parfois soulignées d’une citation. Les clichés désignent à chaque fois leurs propriétaires : des philosophes référents du xxe siècle.
Comment exposer l’art ? Comment produire du sens ? Avec quoi ? Quelle est la fonction de chaque objet ? Quelles sont les catégories qui constituent l’art ? Comment mesurer la distance entre le langage et la représentation ? Kosuth reprend ainsi point par point les questions inhérentes à la nature même de l’art et à ses conditions de production.

« Du phénomène de la bibliothèque », galerie Almine Rech, 19 rue de Saintonge, Paris IIIe, tél. 01 45 83 71 90, jusqu’au 23 décembre.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°586 du 1 décembre 2006, avec le titre suivant : Joseph Kosuth

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque